Eau, Eaux

I. (Hygiène). Pour la boisson comme pour tous les usages domestiques, l’eau de pluie est la meilleure, surtout lorsqu’elle a été recueillie, en rase campagne, dans de larges vases parfaitement propres, après que la première ondée a lavé l’atmosphère et entraîné avec elle ce grand nombre de corpuscules visibles et invisibles qui s’y trouvent constamment en suspension. L’eau qui a coulé sur les toits des maisons, le long des murs construits à la chaux ou crépis en plâtre, contient ordinairement du carbonate ou du sulfate de chaux qu’elle enlève aux bâtisses. Néanmoins la proportion de ces deux substances en dissolution n’est pas ordinairement assez considérable pour altérer sensiblement la qualité hygiénique de l’eau de pluie et lui faire perdre la propriété de faire cuire les légumes et de dissoudre le savon. L’eau de pluie recueillie dans des citernes sert de boisson dans toutes les contrées qui ne possèdent pas d’autres eaux naturelles. — L’eau de neige et l’eau de glace sont aussi bonnes que celles de pluie, lorsqu’on leur a rendu l’air qu’elles ont perdu en se congelant. Il faut, à cet effet, les agiter ou les exposer à l’air libre pendant plusieurs jours.

Les eaux de sources et de fontaines, toujours fraîches et limpides, ne sont pas toutes également pures et hygiéniques. Leur composition dépend de la nature des terrains qu’elles traversent.

Les eaux de puits artésiens sont les plus pures après celles de pluie ; moins riches en sels que les eaux de source, elles sortent toujours de terre à une température plus élevée.

Les eaux de fleuves et de rivières sont également moins riches en matières salines que les eaux de sources, presque toujours moins fraîches et habituellement moins limpides. Les eaux des fleuves et des principales rivières navigables, en France, sont potables et hygiéniques, mais seulement après avoir été filtrées. Dans les grandes villes, les prises d’eau doivent toujours être situées en amont plutôt qu’en aval. Ça donc été une faute, à Paris, d’établir à Chaillot plutôt qu’à Bercy, la pompe à feu qui fonctionne aujourd’hui pour distribuer de l’eau dans les différents quartiers de la ville. On ne peut garantir les propriétés salubres des eaux des petites rivières et des petits ruisseaux, dont le courant est peu rapide, et dans lesquels naissent, vivent, meurent et se décomposent beaucoup de corps organiques ; mais les eaux des rivières qui coulent avec vitesse et en grande masse sur un sol de cailloux ou de sables siliceux, sont toujours potables, parce qu’elles sont très aérées et peu chargées de substances malsaines.

Les eaux de puits sont de qualités très variables, en raison des différents terrains et matériaux au milieu desquels elles circulent et séjournent ; le défaut d’aération les rend ordinairement fades et insipides. Tous les jardiniers savent qu’en arrosant habituellement les plantes avec de l’eau de puits peu aérée et nouvellement tirée, leur végétation est languissante, tandis que, si la même eau a été préalablement agitée ou soumise à l’action de l’air pendant plusieurs heures, avant l’arrosage, elle rend la vie végétale plus active. C’est surtout dans les grandes villes que les eaux de puits sont malsaines. À Paris, outre une très forte proportion de sulfate de chaux qui les rend impropres à la boisson ainsi qu’au savonnage et à la cuisson des aliments, elles renferment beaucoup de nitre et de salpêtre indiquant l’existence dans cette eau de matières organiques provenant des eaux ménagères et des infiltrations des fosses d’aisances qu’elles rencontrent sur leur passage : on devra donc éviter de les employer, comme on le fait trop souvent, à la confection du pain et au coupage des gros vins.

Les eaux de lacs, de marais, d’étangs et de mares, sont les plus chargées de matières étrangères, les plus disposées à la corruption et par conséquent, les moins convenables comme boisson et pour les usages domestiques.

L’eau de mer est impropre à servir de boisson, à cuire les légumes et à tous les autres usages de l’eau potable. On en obtient par la distillation une eau potable, après que celle-ci a été agitée fortement ou exposée au contact de l’air pendant 8 ou 10 jours.

L’eau distillée, exempte d’air, ne devient potable qu’après avoir été exposée à l’action de l’air et agitée vivement pendant un certain temps.

En résumé l’eau est d’autant meilleure qu’elle est plus aérée et moins chargée de sels, ce qui se reconnaît quand elle dissout le savon sans former de grumeaux. L’eau potable doit être incolore, limpide, inodore, dépourvue de saveur fade, salée ou styptique. Les légumes secs, tels que les pois, les haricots et les fèves, doivent y cuire facilement ; elle conserve sa transparence pendant qu’on la fait bouillir et ne laisse qu’un très léger résidu après l’évaporation à siccité. L’eau de rivière, habituellement bonne, peut devenir accidentellement malsaine, à la suite des grandes crues et des grandes sécheresses. L’eau de pluie conservée longtemps dans des citernes peu aérées, et sans être agitée, donne naissance à un nombre infini d’êtres organisés, qui engendrent, par leur décomposition, des gaz délétères et infects. Les meilleures eaux de source ou de rivière, conservées en repos dans des réservoirs ou des fontaines filtrantes, s’altèrent également à la longue, par les mêmes raisons, en contractant une odeur et une saveur désagréables. Il est nécessaire, dans ce cas, de les désinfecter par l’emploi du charbon et par une nouvelle filtration (Voy. Charbon, Filtration). Le meilleur moyen de conserver l’eau potable dans nos climats, consiste à la mettre dans des vases de pierre dure, ou de grès, exposés à une basse température ; elle s’y conservera toujours saine et claire, si on lui a donné le temps de déposer le limon ou les matières étrangères qui la troublent. Les vases en tôle, revêtus d’un enduit résistant pour retarder l’oxydation du métal, sont d’un bon usage ; mais les réservoirs en bois neuf, dont la sève entre en dissolution, donnent à l’eau une odeur et une saveur repoussantes. Les réservoirs en plomb sont très dangereux, parce que l’eau, en y séjournant, même momentanément, peut en détacher des quantités sensibles d’oxydes vénéneux.

Pour obtenir et conserver l’eau fraîche, on emploie divers procédés (Voy. Alcarazas, Glacière, Rafraîchissoir). Pour garder de l’eau chaude ou tiède, on chauffe l’eau jusqu’à l’ébullition dans une bouilloire de cuivre, une cafetière de terre, ou tout autre vase, dont l’ouverture est étroite et fermée ; le vase plein d’eau bouillante est placé sur une table en bois, recouvert d’une enveloppe composée de deux baquets en bois, qui entrent très aisément l’un dans l’autre. L’intervalle entre les deux baquets, qui doit être de 0m,05 à 0m,06, est rempli de laine cardée ou de charbon pilé. Deux poignées de fer ou en bois, clouées sur les côtés du baquet extérieur, servent à enlever facilement cette enveloppe et à la poser sur le vase comme une cloche ou un four de campagne. Une planche ou une grosse toile, clouée sur les bords des deux baquets, retient la laine cardée et le charbon dans l’intervalle qui les sépare. Une peau de mouton ou bien une grosse couverture de laine usée est encore placée, au besoin, au-dessus et autour du vase.

Pour utiliser l’eau dure, c.-à-d. trop chargée de carbonate ou de sulfate de chaux, on y ajoute, quelque temps avant d’en faire usage, une certaine quantité de potasse, ou de soude, ou de sous-carbonate de soude cristallisé (sel de soude du commerce). On agite le mélange avec un bâton, et on l’abandonne au repos. On soutire ensuite le liquide clair qui seul est propre à tous les usages de l’eau de bonne qualité. 500 gr. de sel de soude suffisent le plus ordinairement pour purifier 100 litres d’eau dure. Les cendres de charbon de bois remplacent le sel de soude, mais il en faut employer 1 500 à 1 800 gr. par hectolitre (Voy. Blanchissage et Lessive). L’eau dure, ainsi traitée et clarifiée, devient également bonne pour faire cuire les légumes ; mais ils y contractent un goût désagréable. Le bicarbonate de soude est préférable pour cet usage ; la dose de 8 à 10 gr. suffit pour 500 gr. de légumes, dont il améliore le goût ; il économise en même temps la moitié du sel nécessaire à l’assaisonnement.

Comme boisson habituelle, l’eau fraîche, à la température de 10° à 12°, est celle qui convient le mieux. L’ingestion de l’eau très froide ou glacée dans l’estomac peut offrir de graves dangers, quand le corps est en sueur, qu’il est échauffé non par la chaleur extérieure, mais par l’exercice et le mouvement : dans ce dernier cas, les accidents sont d’autant plus à redouter que l’eau est plus froide, qu’elle a été bue en plus grande quantité, et que l’estomac était dans un état plus complet de vacuité. La prudence exige donc qu’on s’abstienne de boire de l’eau froide quand on a chaud, et, dans tous les cas, les moyens de diminuer le danger sont d’ajouter à l’eau quelque stimulant, comme de l’eau-de-vie ou du vin, de boire par petites gorgées en gardant un moment le liquide dans la bouche, et, si l’estomac est vide, de prendre quelques bouchées d’un aliment quelconque avant de boire. Dans les chaleurs, plus ou transpire, plus on a soif, et plus on boit, plus on transpire. Le meilleur moyen d’arrêter la transpiration et d’apaiser la soif, c’est donc de boire très peu, et une petite quantité de vin généreux ou de café vaut mieux, pour obtenir ces résultats, que l’eau pure. Prise en trop grande quantité, l’eau a de graves inconvénients : si c’est pendant le repas ou immédiatement après, elle trouble la digestion en surchargeant l’estomac. Les indigestions d’eau sont très pénibles. En outre, l’excès habituel des boissons aqueuses amène une débilitation générale, l’inertie des intestins et quelquefois des diarrhées rebelles. Beaucoup de personnes se trouvent bien de boire un verre d’eau fraîche le matin à jeun, et le soir avant de se coucher, quand la digestion du dernier repas est complètement faite.

II. (Médecine). En médecine, l’eau s’emploie, soit seule, soit avec addition de substances médicamenteuses ; à l’intérieur en potions, gargarismes, injections ; à l’extérieur en lotions, fomentations, bains, douches, etc. (Voy. ces mots). — L’eau chaude bue seule est d’une digestion difficile ; sucrée, elle calme presque instantanément les coliques d’estomac et d’intestins ; elle est excitante, sudorifique, expectorante. Dans presque toutes les tisanes, elle agit seule, et l’addition de feuilles, de fleurs ou de fruits, qui donne un goût particulier à la tisane, est à peu près insignifiante. L’eau tiède, bue en abondance et coup sur coup, provoque le vomissement. L’eau froide n’est pas seulement la plus agréable des boissons, elle est rafraîchissante, calmante, diurétique. À l’état de glace, elle est tonique, et prise en petits morceaux, elle calme la soif des malades dans les fièvres graves. — Extérieurement, l’eau chaude, appliquée à la peau, gonfle les tissus, appelle le sang et hâte la suppuration ; l’eau tiède est laxative, elle amollit les tissus sans y appeler le sang ; l’eau froide est sédative ; elle enlève l’irritation et prévient l’inflammation des tissus et la suppuration des plaies ; à l’état de glace, l’eau est astringente, répercussive et résolutive.

III. (Législation). Les eaux privées, comme les biefs et canaux d’usines, canaux d’irrigation, citernes, puits, sources, etc., sont à la disposition de leurs propriétaires, sauf à ne pas nuire aux tiers, et à se conformer aux règlements ou arrêtés de police qui ont pour objet d’assurer la salubrité ou la sûreté de la commune. Les eaux publiques, dont les habitants peuvent se servir en se conformant aux lois qui en règlent l’usage, comprennent la mer, les cours d’eau de toute importance, à l’exception des petits ruisseaux, les fontaines qui alimentent les villes, bourgs et villages, les étangs, mares, lacs publics et communaux. Il est défendu de jeter dans les eaux publiques aucune espèce d’ordures, telles que boues, fumiers ou gravois. On ne peut puiser de l’eau auprès des bateaux de blanchisseuses et lavandières, sous les égouts, aux abreuvoirs et autres endroits où l’eau est croupissante. Au surplus, s’il existe dans une commune ou un département des arrêtés municipaux ou préfectoraux qui prescrivent des dispositions pour la conservation et la salubrité des eaux, tous les habitants doivent s’y conformer, sous peine d’une amende de 1 à 5 fr., prononcée par le tribunal de simple police (Décr. du 7 mars 1808 ; L. du 24 août 1790, tit. ii, art. 3 ; C. pén., art. 471).

Eaux ménagères (Législation)

On n’a pas le droit de les laisser couler sur le fonds d’autrui, à moins qu’on n’ait acquis ce droit par une convention ou par la prescription ; on doit donc les laisser écouler sur son propre sol, ou, si elles ne sont pas insalubres, sur la voie publique ; dans ce dernier cas, on ne peut, sans avoir obtenu l’autorisation du maire (à Paris, du préfet de police), faire aucune saillie ni ouvrage sur la voie publique. Si l’on a le droit de faire écouler les eaux ménagères sur un fonds voisin, on ne peut faire aucun ouvrage, aucune disposition qui aggrave la servitude ; si le droit n’existe que pour les eaux d’un ménage, on ne peut l’étendre au-delà. Si le propriétaire de deux immeubles, sur l’un desquels il y a un signe apparent de la servitude d’écoulement des eaux ménagères (cuvier, gargouille, etc.), vend ce dernier fonds, cette servitude continue d’exister au profit de l’autre. Le droit de laisser s’écouler les eaux ménagères sur la voie publique peut être modifié ou même empêché, dans l’intérêt de la salubrité publique, par des règlements de police du maire ou du préfet ; en contrevenant à ces arrêtés, on est passible d’une amende de 1 à 5 fr. (C. pén., art. 471). — Les eaux des fumiers, sortant des étables, écuries, etc., sont soumises aux mêmes règlements

Eaux minérales. (Hygiène, Médec.)

1° Eaux minérales naturelles. L’usage des eaux minérales prises sans discernement peut offrir des inconvénients graves, et, dans certains cas, de véritables dangers. Bien des malades se décident à aller prendre les eaux de telle ou telle source minérale, parce que des personnes de leur connaissance se sont bien trouvées de l’usage de ces eaux ; elles ne font pas attention aux différences d’âge et de tempérament qui peuvent rendre nuisible à l’un ce qui a pu être salutaire à l’autre. On doit donc, avant tout, consulter son médecin habituel, et, en arrivant au lieu désigné, le médecin des eaux, qui seul possède assez d’expérience spéciale en cette matière pour pouvoir déterminer la dose et le mode d’usage des eaux minérales qui conviennent à l’état de chaque malade. Il n’est que trop vrai que, dans beaucoup de maladies qui paraissent être sans remède, les eaux minérales sont la dernière ressource du médecin et le dernier espoir du malade. Il y a, même dans ces cas désespérés, des exemples de guérisons inattendues obtenues par les eaux minérales ; c’est une dernière chance qu’il faut jouer avec toute la prudence nécessaire pour en avoir le bénéfice. On ne parle pas ici des gens en parfaite santé, qui vont aux eaux chercher de dispendieuses distractions ; il faut seulement leur recommander, si les eaux dont ils ont fait choix possèdent une efficacité reconnue contre diverses maladies, de s’abstenir d’en faire usage par mode et pour faire comme tout le monde, ce qui ne pourrait manquer de les rendre sérieusement malades.

Les eaux minérales, d’après les principes actifs qu’elles contiennent, sont divisées en 4 sections : 1° Eaux sulfureuses ; 2° Eaux acidules ; 3° Eaux salines ; 4° Eaux ferrugineuses. Cette division n’a rien de scientifiquement exact ; car, à l’exception des eaux de la première section qui contiennent toujours plus ou moins de soufre, les autres sont à la fois acidules, salines et ferrugineuses ; seulement, l’une de ces propriétés l’emporte sur les autres et détermine le classement. Indépendamment des principes plus ou moins actifs qu’elles peuvent tenir en dissolution, les eaux minérales doivent dans certains cas des propriétés médicinales très prononcées à leur température. Les eaux minérales chaudes prennent le nom d’eaux thermales, quelle que soit leur composition ; leur chaleur peut varier de 25° à 80° et même au-delà.

Les eaux sulfureuses sont principalement usitées en bains et douches, en injections, en vapeurs fumigatoires contre les douleurs de rhumatisme et pour la guérison des blessures anciennes, ainsi que pour celle des maladies de la peau. Prises à l’intérieur, elles agissent principalement sur l’appareil digestif et sur les organes respiratoires. Lorsqu’elles sont trop excitantes, on les coupe avec du lait, de l’eau d’orge, et autres breuvages adoucissants. Ces eaux ne peuvent se conserver longtemps en bouteilles, même lorsqu’on a eu le soin de les boucher hermétiquement. Les eaux sulfureuses les plus renommées sont, en France : celles d’Ax, Bagnères de Luchon, Baréges, Cauterets, Eaux-Bonnes, Eaux-Chaudes, Enghien, Gréoulx, Saint-Sauveur, Uriage, Vernet, Aix-en-Savoie ; à l’étranger : celles d’Aix-la-Chapelle en Prusse, de Louëche et Schinznach en Suisse ; viennent ensuite celles de Bains près Arles, de Bagnols (Lozère), de Castera Verduzan (Gers), et de Baden (Autriche).

Les eaux acidules doivent leur acidité à la présence d’une certaine quantité de gaz acide carbonique, et quelquefois d’acide sulfurique ; on les reconnaît à leur pétillement dû à un dégagement plus ou moins considérable d’acide carbonique. Elles sont froides ou thermales. Les eaux acidules froides sont particulièrement désignées sous le nom d’eaux gazeuses et ne servent qu’en boisson. Leur emploi en bonne santé est inoffensif ; on fait grand usage, surtout en été, de l’eau de Seltz et de l’eau de Saint-Galmier, douées de propriétés apéritives, propres à exciter l’appétit, et à faciliter la digestion. Les eaux de Soultzbach et de Soultzmalt ont les mêmes propriétés ; celles de Pougues et de Bussang sont encore plus actives. Les personnes d’un tempérament nerveux, très excitables ne doivent point user des eaux gazeuses sans l’avis de leur médecin. Un grand nombre d’eaux minérales acidules sont en même temps thermales ; telles sont celles de Contrexeville, du Mont-Dore, de la Bourboule, de Bourbon-l’Archambault, de Saint-Nectaire et de Vichy. Ces dernières sont employées sous toutes les formes. Elles exercent une action particulière sur le foie ; elles sont généralement vantées dans les engorgements des viscères abdominaux et les affections des voies urinaires. On les recommande contre toutes les maladies chroniques, excepté celles de la poitrine et du cœur, contre les névralgies, les maux d’estomac, la chlorose, etc.

Les eaux salines ont pour principes prédominants certains sels et ne renferment ni soufre, ni fer, ni acides, du moins en quantité notable. Quelques-unes sont alcalines. Ces eaux, prises en boisson, activent les sécrétions de tous les organes ; elles réveillent les organes digestifs frappés d’atonie ; elles sont efficaces contre les engorgements chroniques du système lymphatique et, en provoquant d’abondantes transpirations, elles donnent issue par la voie cutanée à beaucoup de maladies cachées. À l’extérieur, elles sont employées en bains, en douches, ou sous forme de boues, contre les rhumatismes chroniques, les paralysies, les maladies des os et des articulations, etc. Les plus renommées parmi les eaux salines, sans parler de l’eau de mer (Voy. Bains de mer), sont, en France : celles d’Aix-en-Provence, Bagnères de Bigorre, Bagnoles (Orne), Bains (Vosges), Balaruc, Bourbon-Lancy, Bourbonne-les-Bains, Dax, Évaux, Lamothe (Isère), Luxeuil, Néris, Plombières, St-Amand (Nord), Evian St-Gervais (Savoie) ; et à l’étranger : celle de Niederbronn (Alsace), Baden-Baden (grand-duché de Bade) ; de Bade, Pfeffers (Suisse) ; de Bath et Cheltenham (Angleterre) ; de Carlsbad, Pullna, Tœpliz (Bohême) ; de Canstadt, Kissingen, Ems, Hombourg et Wiesbaden (Allemagne) ; de Lucques (Italie), etc.

Les eaux ferrugineuses sont presque toutes froides, inodores, astringentes : on les reconnaît au sédiment couleur de rouille qu’elles déposent sur leur passage ou dans les vases qui les renferment. Elles sont toniques, resserrent les tissus et colorent le teint : mêlées au vin, elles conviennent aux tempéraments lymphatiques, aux sujets indolents et apathiques. Leur usage serait dangereux pour les personnes affligées de maladies du cœur, d’anévrismes, de phthisie pulmonaire. Les femmes enceintes, les tempéraments apoplectiques ou disposés aux affections aiguës doivent s’en abstenir. Elles sont encore administrées en bains, en douches, en vapeurs. La plupart de ces eaux sont en même temps gazeuses, notamment, en France, celles de Bagnères de Bigorre et de Castera Verduzan, que nous avons déjà citées parmi les eaux sulfureuses, et, à l’étranger, celles de Spa, Égra, Marienbad et Pyrmont. Au premier rang des eaux ferrugineuses on doit encore citer les sources de Cransac et de Sylvanès (Aveyron), de Campagne (Aude), de Forgès (Seine-Inférieure), de Passy près de Paris, de Selles et de Vals (Ardèche), etc.

Bien qu’il soit toujours possible, à Paris et dans les grandes villes, de se procurer toute sorte d’eaux minérales naturelles, il est de beaucoup préférable, pour ceux qui en ont les moyens, de prendre les eaux à la source même ; le changement d’air, l’exercice, l’atmosphère pure des montagnes au pied desquelles les sources minérales sont le plus souvent situées, contribuent à la guérison des malades et facilitent l’action curative de ces eaux. Les malades qui fréquentent les eaux minérales et qui ne sont pas assez souffrants pour se priver des plaisirs mis à leur disposition dans ces lieux de réunion, doivent se tenir en garde contre l’entraînement qui peut les porter à abuser de ces plaisirs, à passer fréquemment des nuits au bal, au spectacle, à s’enfermer une partie du jour dans des salles de concert ou des salons de conversation, dont l’air vicié détruit en partie l’effet salutaire des eaux. L’exercice modéré sans fatigue, les distractions sans les agitations du monde, les promenades matinales, le sommeil chaque fois que le besoin s’en fait sentir, et pour tout le reste l’observation rigoureuse des prescriptions du médecin : tel est le régime dont ne doivent pas s’écarter ceux qui vont chercher la santé aux eaux minérales.

2° Eaux minérales artificielles. — Il est matériellement impossible, quel que soit le talent déployé par le chimiste dans la composition des eaux minérales artificielles, que ces eaux soient parfaitement semblables aux eaux minérales naturelles et qu’elles possèdent exactement les mêmes propriétés. Elles peuvent toutefois, dans beaucoup de circonstances, offrir à la médecine une ressource précieuse. Le médecin prescrit l’usage des eaux minérales artificielles à ceux de ses malades qui ne peuvent aller prendre sur place les eaux minérales naturelles. Mais, on ne saurait assez recommander aux gens du monde, trop souvent disposés à se médicamenter eux-mêmes sans règle et sans guide, de ne pas plus faire usage des eaux minérales artificielles que des eaux minérales naturelles, sans avoir pris d’abord les conseils d’un médecin expérimenté.

Eaux minérales (Législation)

Les personnes qui ont ou qui découvrent dans leurs propriétés (à plus forte raison dans la propriété d’autrui) une source d’eaux minérales, ne peuvent l’exploiter pour en vendre les eaux ou pour fonder un établissement de bains, sans avoir obtenu une autorisation du ministre de l’agriculture et du commerce. Cette autorisation n’est délivrée qu’après une consultation et des instructions données au ministre par l’Académie de médecine. La demande d’autorisation se fait par une pétition sur papier timbré adressée au ministre.

Les établissements d’eaux minérales autorisés sont soumis à une inspection permanente confiée à des docteurs en médecine. Les médecins qui veulent obtenir une place d’inspecteur doivent s’adresser au préfet du département, s’il s’agit d’un établissement appartenant à des particuliers ou à une commune ; pour les établissements de l’État ou d’un département, c’est le ministre de l’agriculture et du commerce qui nomme. Les inspecteurs ont la surveillance pour tout ce qui concerne la santé publique, ce qui comprend l’usage des eaux pour les malades : toutefois ils n’ont pas le droit d’empêcher ceux-ci de suivre les prescriptions de leurs propres médecins, ou même de se faire accompagner par eux. Du reste, l’usage des eaux et les mesures d’ordre intérieur à suivre dans l’administration des établissements peuvent être réglementés par des arrêtés du préfet soumis à l’approbation du ministre. Les inspecteurs ont un traitement ; ils ne peuvent rien exiger des malades auxquels ils ne donnent pas, comme médecins, des soins particuliers.

Des particuliers peuvent affermer l’exploitation des établissements d’eaux minérales. Le bail des sources appartenant à l’État, à un département, à une commune, à un établissement charitable, est affermé par des adjudications publiques, à des conditions réglées dans des cahiers de charges approuvés par le préfet ; ceux qui appartiennent à des départements peuvent, en vertu d’un traité délibéré par le conseil général, être concédés pour un temps plus ou moins long, moyennant des conditions réglées dans le cahier des charges dressé par le préfet. Les malades ne doivent payer l’usage des eaux que conformément au tarif fixé dans le cahier des charges.

Pour que la conservation des sources d’eaux minérales soit garantie, il est défendu de faire aucun sondage, aucun travail souterrain sans une autorisation préalable du préfet, dans un périmètre de 1 000 mèt. au moins de rayon, autour des sources dont l’exploitation a été régulièrement autorisée.

Les eaux minérales susceptibles de se transporter peuvent être expédiées hors de la commune où elles ont été puisées. Les bouteilles ou vases qui les contiennent doivent avoir été immédiatement scellées, ce qui est constaté, ainsi que l’accomplissement d’autres mesures tendant à constater l’origine et la bonne expédition des eaux, par l’inspecteur de l’établissement. Les pharmaciens ont le droit de vendre des eaux minérales ; toute personne qui a obtenu une permission de l’autorité, peut en former un dépôt et les débiter. Ces dépôts sont soumis à des inspections.

La fabrication des eaux minérales artificielles ne peut pas être entreprise sans une autorisation du ministre de l’agriculture et du commerce. Pour obtenir cette autorisation, il faut justifier des connaissances nécessaires, et présenter pour garant un pharmacien légalement reçu. Les formules de fabrication sont approuvées par le ministre, et il est défendu de s’en écarter. Les fabriques et les dépôts d’eaux minérales artificielles sont soumis à l’inspection, et l’expédition qui peut en être faite est assujettie aux mêmes précautions que celle des eaux naturelles.

Eaux navigables et flottables

Voy. Cours d’eau navigables et flottables.

Eaux pluviales (Agriculture)

Lorsqu’un sol en pente rapide a une surface lisse et presque imperméable, les eaux pluviales glissent dessus en suivant les lignes de plus grande pente, se réunissent dans les plis des coteaux, et y creusent en peu de temps des ravins en entraînant les terres sur les champs placés dans les thalwegs les moins rapides et les plus larges. Ces sortes de transports sont surtout fréquents au pied des coteaux crayeux exposés aux vents d’ouest ou du nord-ouest. La couche arable y disparaît rapidement ; les ravins deviennent si profonds que ce sont de véritables précipices, et les pierres qu’y roulent les torrents d’orage couvrent souvent plusieurs hectares d’étendue. — Le reboisement (Voy. ce mot) des parties dénudées et la construction de barrages étagés dans les ravins seraient les meilleurs moyens de remédier aux ravages des eaux pluviales ; mais la dépense exigée par ces travaux considérables est presque toujours en disproportion avec la faible valeur du sol dévasté. On pourrait toutefois, sinon détruire le mal, au moins l’amoindrir en facilitant l’introduction immédiate des eaux pluviales dans le sol par le drainage ou tout autre moyen analogue, mais surtout par la culture intelligente du flanc des collines. Ici donc, on essayera du boisement ; on bordera d’arbres tous les chemins et on plantera des pins du Nord à l’origine des ravins ; là, des fossés seront creusés perpendiculairement aux lignes de la plus grande pente ; plus loin on fera des labours aussi profonds que possible, dirigés aussi à angle droit sur les lignes de la plus grande pente ; mais surtout on couvrira le sol des plantes les plus épaisses et les plus vivaces, notamment de prairies artificielles, de sarrasin, etc. — Le morcellement du sol est le seul obstacle sérieux qui puisse empêcher l’emploi de cette méthode : cependant cet obstacle n’est pas insurmontable, et, si l’exemple donné par un cultivateur intelligent venait éclairer tous les autres sur leurs véritables intérêts, les terres rendues stériles par le ravage des eaux pluviales pourraient en peu de temps décupler de valeur.

Eaux pluviales (Législation)

Quoique appartenant primitivement à tout le monde, elles deviennent la propriété de celui qui les a reçues sur son fonds, et qui, dès lors, peut les y retenir, mais sans rien faire pour les déverser d’une manière nuisible, sur les fonds voisins. Le propriétaire d’un fonds inférieur n’étant tenu de recevoir les eaux pluviales des fonds supérieurs qu’autant qu’elles en découlent naturellement, il s’ensuit que les propriétaires de bâtiments ne peuvent faire rejeter les eaux sur les fonds voisins, ni les réunir par des ouvrages pour les déverser ensuite sur les bâtiments ou terrains inférieurs. Mais, quand le propriétaire supérieur ne fait rien pour aggraver la servitude, le propriétaire inférieur ne peut se refuser à recevoir les eaux pluviales tombant naturellement, alors même que, pendant un temps quelconque, le propriétaire supérieur les aurait retenues ou absorbées. Les eaux pluviales qui coulent de la voie publique dans les fossés ou rigoles qui la bordent peuvent être prises par le premier venu, sans que les riverains inférieurs aient le droit de réclamer, quel que soit le temps depuis lequel ils jouissaient de ces eaux. Le riverain inférieur d’une voie publique est obligé de supporter l’écoulement des eaux qui en descendent ; mais si elles étaient réunies dans des fossés au bas de la pente, de manière à former des ruisseaux torrentiels et à occasionner des inondations, l’administration publique serait obligée de payer une indemnité aux propriétaires qui auraient souffert de cette mauvaise disposition des eaux, et de faire exécuter des ouvrages propres à prévenir le retour d’un pareil préjudice (C. Nap., art. 640). Quant aux eaux pluviales qui tombent du toit des bâtiments, Voy. Égout des toits.

Eaux salées (Contributions indirectes)

Il est défendu d’enlever de fortes quantités d’eaux salées ou d’eau de mer pour toute autre destination qu’une fabrique de sel régulièrement autorisée. Cependant les particuliers qui voudraient employer les eaux salées à l’amendement de leurs terres n’ont qu’à en faire la demande aux employés chargés d’en constater la destination.

Eaux et forêts (administr. des)

Voy. Forêts.

EAUX-BONNES (Eaux minérales)

L’établissement des Eaux-Bonnes (Basses-Pyrénées), possède plusieurs sources sulfureuses dont les eaux limpides et pétillantes sont principalement employées en boisson. La Source vieille est la plus importante ; sa température s’élève à 32° centig. Ces eaux sont efficaces pour déterger les vieilles plaies, aider la suppuration, prévenir la carie, raffermir les tissus. Elles sont aussi recommandées contre les rhumes invétérés, l’asthme, les maladies des organes respiratoires, les pâles couleurs, les fièvres intermittentes et toutes sortes d’obstructions. Le prix d’un bain est de 1 fr. ; celui du droit à la buvette est de 50 c. ; un litre d’eau transporté à domicile coûte 25 c. Il s’en fait au dehors une expédition considérable dans les bouteilles hermétiquement bouchées. Plusieurs médecins inspecteurs sont attachés à l’établissement.

La saison commence au mois de juin et finit au mois de septembre : elle attire beaucoup d’étrangers. On se rend de Paris aux Eaux-Bonnes par les chemins de fer de Bordeaux et du Midi jusqu’à Pau en passant par Dax. Prix des places : 1re cl., 100 fr.75 c. ; 2e cl., 75 fr.55 c. (On peut aussi gagner la station de Pau par Toulouse et Tarbes). — La distance de Pau aux Eaux-Bonnes se franchit en 6 h., en allant, et en 4 h., au retour ; prix : 8 et 7 fr.

On trouve, autour de l’établissement des bains, plusieurs hôtels bien tenus et un assez grand nombre de maisons meublées et de restaurants. Les prix y sont en général fort élevés et varient selon la saison et le nombre des visiteurs. On paye le déjeuner et le dîner, à table d’hôte, 4 fr. et 5 fr., en se faisant servir dans son appartement. Le prix d’une chambre varie de 5 à 8 fr.

Comme la plupart des malades sont atteints des mêmes affections, aux Eaux-Bonnes, le genre de vie est à peu près le même pour tout le monde. On se rend le matin à la buvette ; à midi, on se répand au kiosque, aux cascades, dans les délicieux sentiers de Grammont et de Jacquemmot ; les plus valides tentent les grandes excursions. L’exercice à cheval est surtout en faveur.

Eaux-Chaudes (Eaux minérales)

La distance des Eaux-Bonnes aux Eaux-Chaudes est d’environ 6 kil. ; une belle route tracée sur les flancs d’une montagne réunit ces deux établissements voisins. Les Eaux-Chaudes ont les mêmes propriétés physiques que les Eaux-Bonnes ; mais on les utilise plus particulièrement en bains, quoiqu’on les prenne aussi sous forme de douches et en boisson. On les emploie avantageusement contre les rhumatismes, les névralgies en général, les névroses du tube intestinal et quelquefois contre les paralysies. Elles sont nuisibles dans les affections organiques du cœur et aussi dans l’altération du cerveau et de la moelle épinière. — Ces sources sont au nombre de six : Baudot, l’Aressecq, Mainvieille, le Clot, le Rey, l’Esquirette. Leur température généralement faible varie de 11 à 36° cent. La source Baudot est particulièrement efficace contre les maladies des voies aériennes ; les sources de l’Esquirette et de l’Aressecq sont celles dont les eaux se boivent de préférence. La saison commence en juin et finit en septembre. Le prix du bain est fixé à 1 fr., celui de la douche à 75 c. ; le bain de vapeur coûte 2 fr. La boisson, prise aux trois principales sources, est gratuite.

On trouve à se loger aux Eaux-Chaudes dans quelques hôtels bien tenus et dans un assez grand nombre de maisons meublées à des prix très modérés. Une chambre coûte, par jour, 2 fr. ; la nourriture à table d’hôte, déjeuner et dîner, 4 fr.

Eaux diverses

Eaux d’Acacia. Voy. Robinier.

Eau bénite (Religion). Quand on entre dans une église ou qu’on en sort, c’est un usage pieux, dans le culte catholique, de tremper le bout des doigts dans le bénitier et de faire le signe de la croix. — Les personnes qui veulent avoir chez elles de l’eau bénite, peuvent en obtenir en s’adressant au curé ou à l’un des prêtres attachés à la paroisse. On peut ajouter à l’eau bénite une certaine quantité d’eau ordinaire sans qu’elle perde la bénédiction qui y est attachée.

Eau blanche (Écon. rurale). Quand on prépare de l’eau blanche pour la boisson des animaux domestiques, on ne doit pas se borner à jeter le son dans l’eau et à l’agiter un moment avec la main ; il faut prendre deux poignées de son, tremper les mains ainsi pleines, en les pressant fortement l’une contre l’autre à plusieurs reprises, et recommencer avec une nouvelle quantité de son, jusqu’à ce que l’eau soit suffisamment blanchie.

Eau blanche (Médecine). On désigne aussi sous ce nom l’eau de Goulard qui n’est autre chose qu’une solution de sous-acétate de plomb (extrait de Saturne). Cette eau s’emploie en lotions pour les foulures, entorses, contusions, etc.

Eau de Botot (Hygiène). Cette eau de toilette, principalement employée pour les soins de la bouche et des dents, se prépare de diverses manières : — 1° on fait infuser pendant 8 ou 10 heures, dans 875 gr. d’eau-de-vie, 30 gr. de semence d’anis, 8 gr. de girofle, 8 gr. de cannelle concassée ; on filtre ensuite le mélange et on y ajoute 12 décigr. d’huile volatile de menthe et 4 gr. d’alcoolat d’ambre ; — 2° on fait infuser, pendant 8 jours, 40 gr. de semence d’anis, 10 gr. de girofle, 10 gr. de cannelle concassée et 5 gr. d’huile volatile de menthe dans un litre d’eau-de-vie. Au bout de 8 jours, on filtre le mélange et on ajoute à la liqueur ainsi obtenue 5 gr. de teinture d’ambre. — On verse quelques gouttes de cette liqueur dans un verre d’eau pour se rincer la bouche et donner du ton aux gencives.

Eau camphrée. Voy. Camphre.

Eau des Carmes. Voy. Eau de Mélisse.

Eau chlorurée. Voy. Chlore.

Eau de cologne (Hygiène). Pour obtenir une eau de Cologne qui imite parfaitement celle qui est fabriquée dans les maisons les plus renommées, il faut que les divers ingrédients qu’on emploie soient de première qualité et récemment préparés, et surtout que l’alcool soit bien pur et au degré voulu. On doit aussi observer exactement les proportions indiquées par les meilleures recettes. Voici l’une de ces recettes, la plus simple, peu coûteuse, donnant une eau de Cologne qui revient à peu près à 4 fr. le litre. On mêle ensemble 1 kilogr. et demi d’alcool à 36° et 4 gr. de chacune des essences suivantes : romarin, cédrat, citron, bergamote, néroli. Après avoir filtré ce mélange, on le conserve dans des flacons ou des bouteilles qu’on bouche avec soin.

Voici une autre recette qui sert à préparer une eau de Cologne d’une qualité supérieure et d’un prix un peu plus élevé. On mêle ensemble 1 litre d’alcool à 36°, 10 gr. de chacune des essences suivantes : bergamote, cédrat, citron ; 20 gouttes de néroli, 10 gouttes de teinture de benjoin et autant de teinture d’ambre. Deux heures après qu’on a fait ce mélange, on le filtre, et cette eau de Cologne doit être, comme la précédente, conservée dans des flacons bien bouchés.

Dans le commerce, la bonne eau de Cologne est toujours chère : celle qui se vend à bas prix est ordinairement composée avec des alcools de grains, de mélasse ou de fécules incomplètement épurés, et avec des essences communes, comme celles de thym, de romarin ou de lavande. On distingue aisément ces produits inférieurs à leur odeur seule, qui est bien moins agréable que celle des qualités superfines. Pour cela, on verse dans le creux de la main quelques gouttes de l’eau de Cologne que l’on veut apprécier et on la laisse évaporer ; puis on humecte avec un peu d’eau ordinaire la place d’où la liqueur aromatique s’est exhalée : il reste alors une odeur parfaitement dégagée de l’influence de l’alcool et dont, par suite, on apprécie mieux la qualité.

Eau de cuivre (Écon. domest.) On fait fondre dans 1 litre d’eau de rivière 30 gr. d’acide oxalique ou sel d’oseille. Lorsque le sel est bien dissout, on ajoute ce premier mélange à un second mélange composé de 4 cuillerées à bouche de poussier de bois blanc tamisé au tamis de soie, de 3 cuillerées d’esprit-de-vin et de 2 d’essence de térébenthine. On conserve cette eau de cuivre dans une bouteille bien bouchée, avec étiquette, et enfermée sous clef, de manière à éviter toute méprise. Lorsqu’on veut s’en servir, on agite la bouteille ; on verse dans une mauvaise assiette, qui n’a point d’autre usage, une certaine quantité du mélange ; on y trempe légèrement un chiffon de laine, et on enduit l’objet en cuivre non doré qu’on veut nettoyer. Il faut laisser sécher un instant, puis frotter vivement avec un morceau de peau.

Eau dentifrice (Hygiène). Parmi les nombreuses recettes imaginées pour la préparation des liqueurs destinées à entretenir la propreté des dents, en voici deux fort simples, dont la bonté a été constatée par l’expérience.

1° On fait infuser pendant 12 h., dans 500 gr. d’eau-de-vie, 20 gr. de semence d’anis, 5 gr. de girofle, 5 gr. de cannelle concassée, 1 gr. d’huile volatile de menthe. Après avoir décanté et filtré la liqueur, on y ajoute 2 gr. d’alcoolat d’ambre. — 2° On fait macérer pendant un mois, dans 1 litre d’esprit-de-vin ou d’alcool de betteraves, 15 gr. d’anis vert, 7 gr. de girofle et autant de gingembre, 10 gr. de cannelle et autant de pyrèthre. Après avoir décanté et filtré la liqueur, on y ajoute 6 gr. d’essence de menthe.

Pour faire usage de ces liqueurs, on en verse quelques gouttes dans un demi-verre d’eau et on se rince la bouche au moyen d’une brosse à dents. Voy. Dents, Élixir et Poudre.

Eau pour détacher (Économie domestiq.). Cette eau, bonne surtout pour enlever sur les étoffes les taches graisseuses, se prépare avec de l’essence de térébenthine pure, de l’alcool rectifié et de l’éther sulfurique, dans les proportions suivantes : essence de térébenthine, 250 gr. ; alcool, 32 gr. ; éther sulfurique, 32 gr. On mélange parfaitement les trois substances ; on y ajoute, si l’on veut, quelques gouttes d’essence de citron, et l’on conserve cette composition dans une bouteille bien bouchée. Toutes les fois qu’on veut en faire usage, il faut avoir soin de l’agiter : alors on en imbibe, sur la partie tachée, l’étoffe qu’on étend sur un linge plié en plusieurs doubles, et avec un autre linge bien sec on frotte jusqu’à ce que la tache ait disparu.

Eau de fleurs d’oranger. Voy. Oranger.

Eau-forte (Connaiss. pratiq.). C’est proprement de l’acide azotique ou nitrique concentré à 36° ; mais souvent les ouvriers désignent également sous ce nom l’huile de vitriol ou acide sulfurique. — L’eau-forte à passer dont se servent les graveurs sur cuivre est une composition toute différente : c’est une solution d’acide acétique, d’acétate de cuivre, de sel marin, de sel ammoniac, d’alun, etc.

Eau de gomme (Écon. domest.). On remplit jusqu’aux deux tiers une carafe avec de l’eau pure et fraîche ; on y ajoute 30 ou 40 gr. de gomme en morceaux bien choisie ; on agite la carafe à diverses reprises, et, après 7 ou 8 minutes, l’eau de gomme est préparée. À mesure qu’on l’emploie, on la remplace par une nouvelle quantité d’eau pure, en ayant le soin chaque fois d’agiter la carafe. Lorsque la gomme est presque toute fondue, on ajoute une nouvelle quantité de gomme, mais moindre, 15 gr. à peu près, et l’on continue la même manière de procéder, tant qu’on fait usage de cette eau de gomme.

Eau de Goulard. Voy. Eau blanche.

Eau de gruau (Écon. domest.). On la prépare de la même manière que l’eau d’orge (Voy. ci-après) ; seulement, il est inutile de rejeter la première eau, le gruau n’ayant pas l’âcreté de l’orge.

Eau de javelle ou Hypochlorite de potasse. On reconnaît que cette eau est bonne, lorsque, versée dans le creux de la main, elle adoucit la peau, ou lorsque, appliquée sur l’écriture récente, à l’encre noire ordinaire, elle la fait disparaître sur-le-champ.

Eau de lavande. Voy. Lavande.

Eau de mélisse des carmes (Hygiène). On met dans une cruche de grès à large ouverture 3 litres d’esprit-de-vin à 33°, 500 gr. de feuilles et fleurs de mélisse, 16 gr. de racines sèches d’angélique et 125 gr. de zeste de citron. On bouche la cruche aussi bien que possible, et on laisse infuser ces substances pendant 8 jours, en ayant soin d’agiter le vase plusieurs fois chaque jour. Le 9e jour, on passe le mélange à travers un linge d’un tissu fort et serré, en l’exprimant avec force et en soumettant ensuite le marc à une nouvelle pression. Après avoir recueilli tout le liquide ainsi obtenu, on le verse dans la cruche en y ajoutant 200 gr. de coriandre, 40 gr. de noix muscade et 40 gr. de cannelle fine concassées, plus quelques clous de girofle. On laisse encore infuser pendant 8 jours ce second mélange, pour le passer ensuite à travers un linge comme le premier, et, quand on a ainsi exprimé tout le liquide qu’il peut donner, on ajoute à ce liquide un tiers de litre d’eau de fontaine. Après 24 heures de repos, on le tire à clair, on le filtre et on le met en bouteilles. L’eau de mélisse s’emploie à l’intérieur et à l’extérieur ; à l’intérieur, comme stomachique, et pour calmer les maux de nerfs ; à l’extérieur, comme vulnéraire, pour les coupures, les plaies superficielles.

Eau miellée (Écon. domest.) Du miel pur, dissous en petite quantité dans de l’eau chaude, forme une boisson rafraîchissante, précieuse par la facilité avec laquelle elle se prépare. On peut y ajouter un petit filet d’eau-de-vie, de rhum, d’alcool ou de vinaigre aromatisé. Il faut seulement que l’eau soit assez chaude pour que le miel s’y dissolve aisément. En écumant la solution, ou mieux encore, en la filtrant à travers une chausse de laine, on obtient un produit plus agréable. On ne doit préparer à la fois que ce qu’il faut pour la consommation d’un ou deux jours au plus ; la liqueur conservée plus longtemps fermenterait et changerait de nature.

Eau de noyaux. Voy. Noyaux.

Eau d’or ou Liqueur d’or. Voy. Eau-de-vie de Dantzick.

Eau d’orge (Économ. domest.). On met dans une cafetière une poignée d’orge mondé ou perlé, et l’on verse dessus de l’eau bouillante. On place la cafetière sur le feu. Dès que l’eau commence à bouillir, on écoule et on jette cette première eau, et on la remplace par de nouvelle eau qu’on laisse bouillir pendant un quart d’heure. On verse alors dans un linge bien propre tout le contenu de la cafetière, et l’on recueille dans un vase placé au-dessous du linge l’eau d’orge qui s’écoule. — On prépare de la même manière l’eau de gruau et l’eau de riz.

Eau panée. On met de l’eau dans un pot de terre, et, quand elle commence à bouillir, on y jette quelques croûtes de pain. On laisse bouillir pendant 10 minutes, et on passe le mélange à travers un linge propre. Pour obtenir une eau panée plus nourrissante, on enveloppe dans une mousseline claire 125 gr. de mie de pain, on noue cette mousseline de manière que la mie de pain qu’elle renferme ne soit nullement serrée, et on la plonge dans un pot de terre contenant 4 ou 5 verres d’eau. On laisse bouillir pendant 20 minutes, et, après avoir pressé le sac à l’aide d’une cuiller, on le retire : l’eau panée est faite. On l’édulcore avec du sucre, et il faut avoir soin de la remuer toutes les fois qu’on en fait usage.

Eau de Portugal (Hygiène). La composition de cette eau, très employée pour parfumer les mouchoirs, est fort simple. Il suffit de mêler une certaine quantité d’essence d’oranges, dites de Portugal, avec de l’alcool à 36°. Les proportions varient selon qu’on veut obtenir un parfum plus ou moins fort : 60 gr. sont une quantité très suffisante pour 1 litre d’alcool. On laisse infuser le mélange pendant quelques jours, après lesquels on le décante et on le filtre.

Eau de la reine de Hongrie. On fait infuser dans 1 litre d’alcool 400 gr. de sommités fleuries de romarin, 100 gr. de lavande et 100 gr. de marjolaine. Après quelques jours, on passe et on filtre cette infusion, et on conserve la liqueur dans des flacons bien bouchés. On en fait usage à la suite de défaillances et de syncopes, à la dose de 2 ou 3 cuillerées dans un demi-verre d’eau sucrée.

Eau de riz (Écon. domest.). Elle se prépare de la même manière que l’eau d’orge. Voy. ci-dessus.

Eau seconde (Connaiss. pratiques). L’eau dont on se sert pour nettoyer les peintures à l’huile se prépare aisément en faisant dissoudre 1 kilogr. et demi de potasse et un demi-kilogr. de cendre gravelée dans 6 litres d’eau. Cette eau s’applique sur la peinture qu’on veut nettoyer avec une éponge ou mieux un gros pinceau. Comme l’eau seconde enlèverait toute la peinture si on la laissait séjourner longtemps dessus, on lave aussitôt à grande eau et ce lavage emporte à la fois l’eau seconde et les impuretés. — Il faut se garder d’employer l’eau seconde pour nettoyer les peintures vernies : celles-ci se nettoient avec de l’eau de savon. — On peut se servir aussi de l’eau seconde pour nettoyer les peintures à la colle (en détrempe) ; mais il faut qu’elle soit très affaiblie et suivie sans retard d’un lavage à l’eau pure.

On donne aussi le nom d’eau seconde à l’eau-forte (acide azotique), étendue de plus ou moins d’eau dont on se sert pour décaper les métaux.

Eau sédative (Médecine). Voici la formule de cette eau telle qu’on la trouve dans le Manuel de médecine de M. Raspail. Eau sédative ordinaire : ammoniaque liquide à 22°, 60 gr. ; alcool camphré, 10 gr. ; sel marin, 60 gr. ; eau ordinaire, 1 lit. ; — Eau sédative moyenne : ammoniaque, 80 gr. ; alcool, 10 gr. ; sel, 60 gr. ; eau, 1 lit. ; — Eau sédative très forte : ammoniaque, 100 gr. ; alcool, 10 gr. ; sel, 60 gr. ; eau, 1 lit.

Pour préparer l’eau sédative sans avoir besoin d’en peser les ingrédients, on fait dissoudre une poignée de sel de cuisine dans un verre d’eau. Quand cette opération est achevée et que l’eau a repris sa limpidité, on verse, dans une bouteille de la capacité d’un litre, d’abord la valeur de deux petits verres à liqueur d’ammoniaque liquide et d’un demi-petit verre d’alcool camphré ; puis, le verre d’eau salée tout entier ; on agite fortement le mélange et on achève de remplir la bouteille avec de l’eau ordinaire. On peut dissimuler l’odeur de l’eau sédative avec de l’essence de roses ou toute autre essence analogue. La bouteille doit être exactement bouchée et conservée dans un lieu frais.

L’eau sédative ne s’emploie qu’à l’extérieur en lotions et en compresses. En général, il ne faut se servir que de l’eau sédative ordinaire, et encore fait-on bien de l’augmenter d’eau quand il s’agit de soigner des personnes dont la peau est très délicate, marquée de petite vérole ou cicatrisée d’une manière quelconque ; l’eau moyenne convient dans les cas de piqûre de la vipère, du scorpion et des insectes venimeux ; l’eau très forte est destinée aux personnes dont la peau est dure ou calleuse, ainsi qu’au traitement des maladies des bestiaux.

Eau de Seltz (Hygiène, Écon. domest.). L’eau naturelle de Seltz ou Selters est une eau minérale dont la source très abondante est située dans le duché de Nassau, et qui doit ses propriétés médicinales et hygiéniques à la grande quantité de gaz acide carbonique qu’elle renferme. Cette eau, dont il s’expédie annuellement plus de 2 millions de bouteilles, se conserve très bien ; c’est une boisson aussi agréable que salubre pendant les chaleurs de l’été. Elle favorise la digestion, et dissipe les embarras d’estomac ; elle est encore recommandée pour combattre les dépôts urinaires et dans certaines affections du foie.

L’eau de Seltz factice dont on fait un si fréquent usage n’a pas toutes les propriétés de l’eau naturelle : elle n’est pas moins très agréable comme boisson mélangée avec le vin. On la prépare au moyen de deux substances en poudre qui sont l’acide tartr

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