Bière

(Hygiène, Économie domestique). — La bière, préparée avec soin, se conserve d’autant plus longtemps qu’elle est plus forte, c.-à-d. que la proportion du houblon employé est plus considérable, et qu’elle est plus riche en alcool. Toutefois, à l’exception de l’ale, du porter, du faro et de quelques autres qu’on garde longtemps en bouteilles, la bière ordinaire devient promptement acide et doit être bue dans les trois ou quatre mois qui suivent sa préparation.

L’usage de la bière est sain : elle excite les organes digestifs et facilite la sécrétion des urines. C’est une boisson excellente pour les personnes maigres et faibles ; tonique, comme tous les amers, elle convient parfaitement aux enfants et aux sujets lymphatiques, pourvu qu’elle ne répugne pas à l’estomac et qu’elle ne trouble pas les fonctions digestives. Il faut faire un usage modéré des bières fortes et capiteuses ; éviter celles qui sont mal préparées et trop chargées de levure ; les bières récentes ; claires et légères sont préférables pour la santé. Prise avec excès, la bière pèse sur l’estomac ; elle donne des vertiges et produit une ivresse prolongée et stupéfiante.

Les substances étrangères contenues dans la bière qui n’a pas été clarifiée rendent cette boisson malsaine, désagréable à boire, et de plus l’empêchent de se conserver. On la clarifie ordinairement avec de la colle de poisson, ou des pieds de veau ; mais la première de ces substances est d’un prix assez élevé, et il n’est pas toujours facile de se procurer la seconde. On peut employer au même usage une décoction de graine de lin, et voici comment il faut procéder. Pour une quantité de 250 à 300 litres de bière, on prend un demi-litre de graines de lin, qu’on lave d’abord dans un peu d’eau froide et qu’on fait ensuite bouillir dans 5 ou 6 litres d’eau, pendant une heure, en remplaçant de temps à autre par une nouvelle quantité d’eau chaude celle qui s’est évaporée. On obtient ainsi une décoction épaisse et mucilagineuse qu’on sépare des graines après un quart d’heure de repos, et qu’on verse dans le moût une demi-heure avant d’y ajouter le houblon.

Quand la bière commence à se gâter dans un tonneau en vidange, on soutire ce qu’on veut consommer et on y jette une cuillerée de poudre de coquilles d’huîtres calcinées ; au bout d’une demi-heure, la bière est claire et bonne à boire.

Il peut arriver que la bière soit altérée par les vases et appareils qui servent à sa fabrication. On reconnaît la présence du cuivre en faisant évaporer la bière, et après avoir incinéré le résidu, en traitant les cendres par l’acide azotique étendu ; on obtient alors un liquide bleuâtre qui prend, par l’ammoniaque, une teinte bleue beaucoup plus foncée, et qui donne, par le cyanure jaune, un précipité brun rougeâtre. La présence du plomb peut être reconnue par le précipité blanc que fait naître le sulfate de soude.

La petite bière, qui se vend à très-bas prix, est souvent fabriquée avec une décoction de feuilles et d’écorce de buis, qu’on aiguise avec du vinaigre, ou de l’eau-de-vie. On remplace encore le houblon par des plantes amères ou autres, telles que feuilles de ményanthe, fleurs de tilleul, gentiane, tête de pavot, bois de réglisse, jusquiame, noix vomique, ou bien encore par une poudre composée de sulfate de cuivre, de persulfate de fer, etc. — Ces sophistications ne peuvent être que nuisibles à la santé : on les reconnaît en général à la saveur amère et nauséabonde de la bière : l’analyse chimique est souvent impuissante à constater ces sortes de falsifications.

Fabrication domestique de la bière. — Il est presque toujours aisé de se procurer de la bière fabriquée par des brasseurs : cependant voici deux procédés de fabrication qui sont à la portée de tout le monde et qui peuvent être mis à profit dans les campagnes.

Premier procédé. On prend 25 litres de drèche (Voy. ce mot) ; on la fait tremper 2 ou 3 heures dans de l’eau presque bouillante, et on soutire le liquide ; puis on reverse une nouvelle eau sur la drèche, et, après avoir laissé tremper, on tire à clair ; les deux décoctions réunies, on ajoute environ 250 gr. de houblon et on fait bouillir de manière à avoir de 35 à 40 litres de bière. Quand le moût est assez cuit, on le passe dans un tamis de crin et on le met en cuve ; aussitôt qu’il est refroidi à 18 degrés environ, on y ajoute 4 à 5 cuillerées de levure, et on laisse fermenter. Quand le travail de fermentation a cessé, on colle et on met en bouteilles ou en cruchons. Cette bière est excellente et peut se conserver très-longtemps. — On peut même se procurer de la petite bière en faisant tremper pendant 4 ou 5 heures dans de l’eau très-chaude la drèche qui a déjà servi et en faisant bouillir cette décoction avec du houblon.

Second procédé. On dessèche au four, ou simplement dans une poêle, 4 ou 5 kilogr. d’orge ou d’avoine, qu’on moud ensuite grossièrement ; on verse dessus à peu près 20 litres d’eau très-chaude sans être bouillante, on laisse reposer 3 heures et on tire à clair ; on verse encore 15 litres d’eau froide, on laisse reposer 1 heure 1/2 et on tire à clair. On mêle ces deux infusions avec 6 kilogr. de mélasse délayés dans 30 litres d’eau tiède, on y ajoute 250 gr. de houblon et on brasse tant que le houblon surnage. On met ensuite la levure et on laisse fermenter. Quand la fermentation a cessé ou à peu près, on entonne la bière, mais on ne met la bonde qu’au bout de 3 jours : 15 jours après cette bière sera bonne à boire.

On peut préparer une bière très-économique avec les racines du chiendent. On les coupe au printemps ou à la fin de l’automne, et quand elles sont sèches en les fait bouillir avec du houblon et de la mélasse ou de la cassonade : on ajoute de la levure, on laisse fermenter et on entonne.

Bière à froid. On a proposé sous ce nom une boisson économique qui ne revient pas à 1 c. le litre. En voici la formule et la préparation :

Eau ordinaire : 1 hectol.
Mélasse : 2 kil. 500 gr.
Fleurs de houblon : 100 gr.
Racine de gentiane : 50 gr.
Levure de bière : 50 gr.

On fait infuser le houblon et la gentiane dans 15 ou 20 fois leur poids d’eau bouillante ; on passe à travers une toile, on délaye la mélasse dans une partie de l’eau et la levure dans une autre ; on verse toutes ces liqueurs dans un tonneau avec le restant de l’eau ; on brasse bien et on abandonne à la fermentation. Si celle-ci marche bien, la boisson est bonne à boire au bout de 5 à 6 jours. Elle offre alors les propriétés suivantes : elle est d’une transparence parfaite ; sa couleur et son odeur rappellent celles du petit cidre de bonne qualité ; elle a une saveur légèrement amère, sans astringence, sans fadeur, sans arrière-goût ; elle est à la fois légère et cordiale ; mise en bouteilles au bout de 4 à 5 jours de préparation, elle devient très-mousseuse ; en y ajoutant un peu de caramel, de coriandre, ou de fleur de sureau, on la rend plus agréable au goût. Voy. Boissons économiques.

Bière de Sapinette. Voy. Spruge-bier.

Bière russe. Voy. Kwas.

Bières (Contributions indirectes). Voy. Brasseur, brasseries.

BIÈRE ou Cercueil. Voy. Pompes funèbres.

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