Fruits

(Hygiène). L’usage alimentaire des fruits, même de ceux qui passent pour indigestes et malsains, n’offre pour la santé des inconvénients sérieux que lorsqu’on en fait usage sans discernement et sans précaution. À un point de vue général, les fruits mûrs, à moins qu’ils ne soient pris en grand excès et qu’ils n’occasionnent des indigestions, ne peuvent nuire à la santé pendant la saison chaude et sèche ; leur usage habituel est alors au contraire aussi salubre qu’agréable. C’est ainsi qu’en Espagne et en Italie, spécialement à Naples, le melon dont tout le monde mange en été, pour ainsi dire toute la journée, n’incommode personne ; en France, sous le climat de Paris, l’usage immodéré du melon occasionne, de même que celui des prunes, des fièvres intermittentes et des diarrhées qui dégénèrent en dysenteries dangereuses. Ces accidents ne s’observent jamais en plein été, durant les fortes chaleurs ; ils ont lieu à l’arrière-saison, surtout quand l’été n’a pas été très chaud, que les melons et les prunes ayant mûri tard, sont livrés en grande quantité et à bas prix à la consommation, et que la température humide de l’automne a succédé à la température sèche de l’été. Ce principe doit servir de règle pour la consommation de tous les fruits réputés fiévreux ; ils ne le sont en effet que quand on les consomme hors de propos et avec excès. La fraise, le premier des fruits rouges, peut être mangée à discrétion, comme la framboise ; bien plus, l’usage prolongé des fraises mangées à tous les repas tant que dure la saison de ce fruit, est, dit-on, le meilleur des remèdes connus contre la goutte. Les personnes dont l’estomac est peu actif font bien de joindre aux fraises un peu de vin et de sucre qui en facilitent la digestion. Les groseilles à grappes, pourvu qu’elles soient bien mûres, et les cerises de toutes les variétés plus ou moins acides, sont également inoffensives. Les groseilles à maquereau, et les cerises douces à noyau oblong, sont plus difficiles à digérer ; les guignes et les bigarreaux ne doivent être consommés qu’avec modération, surtout par les enfants. Les poires, pommes, abricots et prunes, à l’état tout à fait verts, ou seulement à demi-mûrs, ainsi que le raisin à l’état de verjus, qu’on débite tous les ans en quantités énormes dans les villes, sont dangereux pour la santé publique ; si le mal qu’ils font aux enfants et aux femmes, qui les préfèrent aux fruits mûrs, était bien apprécié, la police en défendrait la vente comme elle défend celle de la viande gâtée et du poisson corrompu. Le raisin mûr nuit rarement à la santé, à moins qu’on n’en mange avec excès ; dans le Midi, il produit l’ivresse, absolument comme l’usage du vin doux ; il fermente dans l’estomac. Il faut user modérément de l’abricot, de la pêche et de la prune, à l’état frais, même quand ces fruits sont très mûrs. Conservés secs, ou sous forme de diverses confitures, l’abricot et la prune sont inoffensifs. Parmi les fruits secs, les figues, les dattes et le raisin sont les plus nourrissants ; la figue sèche peut causer de graves indigestions lorsqu’on en mange avec excès. Les pommes et les poires mûres, à l’état frais, surtout les espèces qui mûrissent en hiver, sont les meilleurs et les plus salubres des fruits des climats tempérés. Les poires et les pommes cuites sont un des aliments les plus sains et les plus légers qu’on puisse offrir aux convalescents.

Fruits conservés (Écon. domest.)

Les fruits de toute espèce cueillis précisément à leur point de maturité ne se conservent en bon état pendant un certain temps, chacun selon son espèce, que dans un local spécialement approprié à cet usage (Voy. Fruitier). Les procédés imaginés pour prolonger la conservation des fruits manquent presque tous leur but en ce qu’ils dénaturent les fruits conservés et les rendent méconnaissables. Ils s’appliquent difficilement aux fruits délicats, tels que les pêches et les prunes. Si l’on entoure d’une couche épaisse de filasse des cerises, des prunes et des pêches, qu’on revête cette filasse d’un enduit de cire fondue, et qu’on place le tout dans un lieu frais, on pourra peut-être, au bout d’un certain temps, si l’on défait les enveloppes avec précaution, trouver quelques uns de ces fruits encore mangeables. — Pour la conservation des fruits à pépins, on emploie certains procédés curieux, pratiqués plutôt à titre d’expérience, que réellement applicables à des provisions de quelque importance. Les fruits sont enfermés dans des boîtes de fer-blanc hermétiquement closes par la soudure ; ces boîtes sont ensuite plongées dans un puits ou déposées à l’intérieur d’une glacière. — Pour le raisin, on emploie assez fréquemment avec succès le procédé suivant. Dans une caisse de bois ou dans un tonneau en bon état, on suspend à des ficelles tendues horizontalement, plusieurs étages de grappes, après avoir enduit de cire le bout de leur support. Cela fait, on tamise par-dessus les grappes du sable siliceux fin bien sec, jusqu’à ce que le tonneau en soit rempli. Un trou ménagé à la partie inférieure de la caisse ou du tonneau, permet d’en faire écouler le sable à volonté, soit pour vérifier l’état du raisin conservé, soit pour en livrer une partie à la consommation. Cela vaut mieux que de pendre les grappes par des ficelles sur des cercles de tonneau, au plafond d’une chambre, où, si l’air est humide, le raisin moisit et tombe grain à grain, et s’il est sec, le raisin finit par n’avoir plus que la peau collée sur les pépins.

Les groseilles, cerises et prunes attachées aux branches coupées et gardées ainsi dans un fruitier, reprennent à peu près leur état naturel, lorsque, après avoir rafraîchi le bout des branches, on fait tremper l’extrémité du bois dans l’eau chaude, où elle doit séjourner jusqu’à son entier refroidissement. La peau des fruits s’étend et la chair se raffermit. Les grappes de raisin se raffermissent de la même manière en rafraîchissant et coupant le bout du support de la grappe que l’on fait tremper également dans l’eau chaude. Les noix sèches reprennent presque leur état naturel lorsqu’on les fait tremper dans l’eau froide ou le lait chaud. — L’opération du rafraîchissement des cerises, groseilles, prunes et raisins sera faite la veille du jour où ces fruits seront livrés à la consommation ; ils s’altèrent promptement et doivent être consommés sans retard.

Fruits conservés dans le miel. Après avoir blanchi les fruits préparés pour ce mode de conservation, on les plonge dans du miel de bonne qualité, liquéfié par une douce chaleur. Quand les pots sont parfaitement refroidis, on les recouvre d’un parchemin ou d’un morceau de vessie pour les conserver dans un lieu frais, mais sec.

Lorsqu’on veut faire usage de ces fruits, on les fait tremper quelque temps dans l’eau fraîche, ce qui leur rend leur goût naturel ; mais il faut les consommer tels qu’ils sont, ou les faire cuire promptement. Si le goût du miel ne déplaît pas, le liqueur miellée remplacera l’eau et le sucre dans la préparation de la compote de fruits ainsi conservés ; autrement, après avoir fait bouillir le fruit séparément avec un peu d’eau et avec un peu de sucre on obtient une compote ou une marmelade d’une saveur douce très agréable.

Fruits conservés dans l’eau légèrement salée. Les olives entières, les cédrats coupés par morceaux, les petites oranges vertes, dites chinois, et quelques autres fruits du Midi sont habituellement mis dans la saumure pour les conserver et les transporter au loin (Voy. Saumure). — Les noix à l’état de cerneaux, les amandes et avelines fraîches séparées du brou et de l’enveloppe ligneuse peuvent de même être conservées par ce moyen, après avoir été préalablement blanchies dans l’eau bouillante ou simplement macérées dans l’eau froide pendant 24 heures.

Fruits conservés dans le sirop vinaigré. On conserve spécialement par ce procédé les fruits récoltés dans un état de maturité trop peu avance pour qu’ils puissent être soumis avec avantage aux autres moyens de conservation. — On ajoute à une certaine quantité de vinaigre blanc, de la meilleure qualité, proportionnée au nombre des fruits qu’on veut conserver, du sucre blanc en poudre, en quantité suffisante pour que, au bout de quelques jours, l’acide ne domine pas trop. C’est dans ce sirop vinaigré que l’on met les fruits entiers après les avoir blanchis. En quelques semaines, le sirop a parfaitement pénétré les fruits, qui prennent un goût particulier et très agréable. On a soin de tenir les vases de verre ou de grès qui les renferment dans un local dont la température ne soit ni trop chaude ni trop froide. On prépare ainsi plus spécialement les cerises, les groseilles, les abricots, les poires et les brugnons.

Fruits au jus ou au sirop, conservés d’après la méthode d’Appert. En suivant seulement les indications données par Appert dans son Livre de tous les ménages, on n’obtient le plus souvent que des produits qui deviennent promptement acides et perdent alors toute leur saveur naturelle. Divers perfectionnements récemment introduits assurent le succès complet de l’opération. Le bouchage impénétrable des vases et la durée de l’ébullition de ces vases dans un bain-marie chauffé à la température voulue sont les deux principaux éléments de succès. L’emploi d’un sirop blanc clarifié, ayant une densité déterminée pour chaque espèce de fruit, est encore un perfectionnement important du procédé primitif. Ces trois conditions doivent toujours être remplies ; les autres manipulations varient un peu, mais seulement dans le mode de préparer les fruits avant de les mettre dans les bouteilles. Voy. pour ces diverses manipulations, les noms de chacun des fruits et aussi les articles Blanchiment des fruits et Conservation des substances alimentaires.

Fruits confits (Économie domestique)

Les fruits confits, lorsqu’ils ont été convenablement préparés, doivent être transparents, tendres, lisses, et se conserver assez longtemps sans qu’ils éprouvent aucune altération. Pour obtenir ces résultats, il convient d’abord d’apporter le plus grand soin au blanchiment des fruits, opération qui consiste à les tenir plongés plus ou moins longtemps, suivant leur nature, dans une bassine d’eau bouillante, après qu’ils ont été tournés ou épluchés (Voy. Blanchiment des fruits). Pour les fruits qui doivent rester blancs, on ajoute à l’eau du blanchiment un peu de jus de citron, de verjus ou d’acide citrique. Pour ceux qu’on veut faire reverdir, il faut, après qu’ils ont été blanchis, les plonger dans l’eau froide, les égoutter, les remettre dans la bassine avec quelques poignées d’épinards, couvrir la bassine, les retirer aussitôt que l’eau va entrer en ébullition, et les plonger de nouveau dans une grande quantité d’eau froide, où on les laisse 12 heures, en ayant soin de changer l’eau assez souvent.

Ensuite on donne aux fruits la première façon soit en les faisant bouillir dans un sirop de sucre, soit plus simplement en versant ce sirop sur les fruits. La seconde façon et les suivantes se donnent d’après l’un ou l’autre de ces deux procédés. Le nombre des façons varie suivant la nature du fruit, c.-à-d. suivant la facilité avec laquelle il se laisse pénétrer par le sucre. 5 ou 6 façons suffisent pour la plupart des fruits, et il faut laisser entre chaque façon un intervalle qui est habituellement de 12 et quelquefois de 24 heures. Plus les façons sont nombreuses, plus il convient que le sirop de sucre soit à un degré inférieur pour la première façon : on augmente progressivement ce degré pour les façons suivantes. En général, le sirop doit marquer 10 degrés à la première façon, et on l’augmente de 4 degrés pour chacune des façons qui sont ensuite données, de manière qu’il soit amené à 30 ou 32 degrés pour la dernière. Le moyen de donner aux fruits un plus bel aspect, c’est de remplacer le sirop qui les a confits par du sirop nouveau quand on les soumet à la dernière façon. Voy. Abricots, Angélique, Coings, Oranges, etc.

Fruits confits au candi. Voy. Candi.

Fruits secs

On se borne à leur enlever, soit par la chaleur d’un four, soit par celle du soleil, toute l’eau de végétation surabondante, en les conservant dans un certain état de mollesse, de manière à les garantir de la décomposition sans leur ôter leur saveur. Une dessiccation complète, même trop avancée, altère toujours les qualités comestibles des fruits ; ils cessent alors d’être nourrissants et agréables au goût. Voy. Prunes, Poires, Pommes, Figues, Dattes, etc.

Fruits à l’eau-de-vie. Voy. Abricots, Cerises, Pêches, Prunes, etc.

Ratafia de Fruits rouges

On le prépare avec des cerises, des groseilles et des framboises, dans les proportions suivantes : cerises, 2 kilogr. ; groseilles, 1 kilogr. ; framboises, 500 gr. Après avoir égrené la groseille, écrasé la chair des cerises et concassé les noyaux, on met ces deux fruits ainsi préparés dans une petite bassine sur le feu, avec 500 gr. de sucre, et, dès qu’il y a eu deux ou trois bouillons, on verse le contenu de la bassine sur un tamis placé au-dessus d’une terrine. Quand tout le jus, bien exprimé, s’est écoulé, on le mesure ou on le pèse, et on le met dans une cruche de grès, en y ajoutant une égale quantité d’eau-de-vie, les framboises entières, et, si l’on veut, quelques clous de girofle ou quelques fleurs d’œillet dit de ratafia, pour le parfumer. On peut aussi préparer à froid ce ratafia, en écrasant les fruits à la main. Dans tous les cas, on laisse la liqueur se reposer dans la cruche pendant un mois ; ensuite on la filtre à la chausse, et on la met en bouteilles.

Fruits (Droit). De quelque espèce qu’ils soient, ils appartiennent au propriétaire de la chose qui les produit ; tels sont les produits spontanés de la terre, les herbes, les foins, etc. ; les produits de la culture, les céréales, les raisins, etc., les petits des animaux, les intérêts de l’argent, les loyers des maisons, etc. Si le propriétaire a droit aux fruits, ce n’est qu’à la charge de rembourser les frais faits par des tiers, comme les labours, ensemencements, etc. La durée et les conditions de la jouissance des fruits par l’usufruitier sont réglées par la loi (Voy. Usufruit). Celui qui possède de bonne foi une chose qu’il croit être à lui, fait les fruits siens ; il faut pour cela qu’il possède comme propriétaire, en vertu d’un titre dont il ignore les vices ; du moment où ces vices lui sont connus, il cesse d’être de bonne foi, et alors il est tenu de rendre les produits avec la chose au propriétaire qui la revendique. De même, celui qui a reçu, de mauvaise foi, une chose qu’il savait ne lui être pas due, est tenu de la restituer, ainsi que les fruits. Lorsque des fruits doivent être restitués, cette créance porte intérêt à dater du jour de la demande en restitution. Les jugements qui condamnent à une restitution de fruits ordonnent qu’elle sera faite en nature pour la première année, et, pour les années précédentes suivant les mercuriales du marché le plus voisin, eu égard aux saisons et aux prix communs de l’année, sinon, à dire d’experts, à défaut de mercuriales. Si la restitution en nature pour la dernière année est impossible, elle se fait comme pour les années précédentes.

Les fruits des arbres non encore cueillis, et les récoltes encore pendantes par les racines sont immeubles ; dès que les fruits sont détachés et les grains coupés, quoique non encore enlevés, ils sont meubles. Cette distinction est importante ; ainsi, qu’un testament ou une donation comprenne les biens meubles ou les biens immeubles du disposant, elle embrassera ou n’embrassera pas les fruits, selon qu’ils auront été ou non détachés des arbres ; ainsi, l’hypothèque qui frappe un immeuble ne s’applique plus aux fruits dès qu’ils ont été cueillis ; ainsi encore, les formes nécessaires pour les saisir varieront selon qu’ils tiendront encore à l’arbre ou qu’ils en seront détachés. Les fruits ou récoltes pendants par racines sont l’objet de la saisie-brandon (Voy. cet article). Les propriétaires et principaux locataires, peuvent pour défaut de payement de fermage, appliquer la saisie-gagerie aux fruits qui sont dans les bâtiments et sur les terres qu’ils ont loués (Voy. Saisie-Gagerie). La saisie immobilière comprend les fruits de l’immeuble saisi qui n’ont pas été séparés de la terre ou de l’arbre ; il y a plus, les fruits recueillis après la transcription de la saisie, ou le prix qui en provient, sont immobilisés pour être distribués avec le prix de l’immeuble par ordre d’hypothèque (C. Nap., art. 520, 547, 549, 1155, 1378 ; C. de procéd., art. 129, 626, 682, 819).

Des peines sont prononcées contre l’atteinte, trop fréquente, portée à la propriété d’autrui par des soustractions ou consommations de fruits. Une amende de 1 à 5 fr., avec emprisonnement en cas de récidive, frappe ceux qui, sans autre circonstance aggravante prévue par les lois, cueillent des fruits ou ramassent ceux qui sont tombés, ou les mangent sur le lieu même ; si les fruits sont emportés du lieu où ils ont été cueillis ou ramassés, si des productions utiles quelconques de la terre ont été dérobées, sans aucune des circonstances qui caractériseraient le vol proprement dit, la peine est une amende de 5 à 10 fr. appliquée par le tribunal de simple police. Les tribunaux correctionnels punissent d’un emprisonnement de 15 jours à 2 ans, et d’une amende de 16 à 200 fr. ceux qui volent ou tentent de voler dans les champs des productions utiles de la terre ; la peine est augmentée selon les circonstances qui ont accompagné le délit. L’amende de 6 à 10 fr. atteint ceux qui, n’étant ni propriétaires, ni usufruitiers, ni jouissant d’un terrain ou d’un droit de passage, y sont entrés et y ont passé dans le temps où ce terrain était chargé de raisins ou autres fruits mûrs ou voisins de la maturité (C. pén., art. 388, 471, 475).

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