Fossés

(Agriculture, Législation). L’utilité principale des fossés autour des pièces de terre cultivée, c’est de les clôturer (Voy. Clôture). Au point de vue légal, pour être considéré comme clôture, un fossé doit avoir une largeur d’au moins 1m,30 et une profondeur de 0m,65. Il est considéré seulement comme fossé de limite quand sa largeur ne dépasse pas 0m,70. — Dans les terrains fortement inclinés, les fossés ouverts au bas de la pente de chaque champ ont pour objet une utilité toute particulière ; la terre des parties supérieures du champ s’y entasse, entraînée par les eaux pluviales, et les comble en peu de temps. Cette terre reprise dans le fossé, où elle est restée en réserve, est reportée au sommet de la pente ; elle y tient lieu périodiquement d’amendement ; on nomme cette opération tombereller les terres, parce que le transport des terres reprises dans les fossés se fait dans des tombereaux. Dans plusieurs cantons de l’ouest de la France, les baux imposent aux fermiers l’obligation de tombereller les champs en pente, et d’entretenir en bon état les fossés pour cet usage. Dans les pays vignobles, on ouvre de distance en distance des fossés en travers de la pente, pour arrêter les terres entraînées par les pluies. Ces terres sont reprises dans les fossés, et reportées périodiquement sur les parties les plus élevées des coteaux couverts de vignes. — Pour les fossés servant à l’irrigation et pour les fossés de vidange, Voy. Irrigation et Étangs.

Celui qui prétend qu’un fossé n’est pas mitoyen avec l’immeuble voisin, mais qu’il lui appartient exclusivement, doit prouver son droit par un titre, auquel équivaudraient des bornes placées au-delà du fossé et qui ne seraient pas contestées, ou par la prescription établie par des faits de possession durant depuis 30 ans, tels que le curage, l’entretien, le profit exclusif des boues, l’appropriation exclusive des eaux, par la présomption légale résultant de ce que la levée ou le rejet de la terre se trouverait seulement de son côté, ce qui est le signe de la non-mitoyenneté. Celui qui établit un fossé sur son terrain laisse ordinairement au-delà une berge, ou franc-bord, dont la largeur est déterminée par les usages locaux ; quelle que soit la distance laissée, le propriétaire du fossé est obligé de réparer les éboulements qui se manifestent au delà, et tenu, s’il y a lieu, à des dommages-intérêts. Ce qui croit sur la berge appartient au propriétaire du fossé, lequel ne peut y planter ni laisser croître des arbres sans observer la distance prescrite par la loi, à moins que le voisin n’y consente. Le riverain de la berge peut la prescrire, p. ex., en la cultivant, si c’est un champ, ou en la fauchant, si c’est un pré, pendant 30 ans. — En général, tous les fossés qui se trouvent entre deux héritages sont présumés mitoyens, à moins que l’un des propriétaires ne prouve son droit exclusif. Les fossés mitoyens sont la propriété indivise des riverains ; l’un d’eux ne peut les combler sans le consentement de l’autre. Les arbres qui croissent dans un fossé mitoyen appartiennent par moitié à chacun des riverains, qui doivent s’entendre pour les émonder, les abattre et se les partager. Le fossé mitoyen est curé, entretenu et réparé à frais communs ; chacun des copropriétaires peut obliger l’autre à contribuer à cette dépense, et même se faire autoriser à exécuter les travaux, sauf à réclamer la moitié de ce qu’ils auront coûté, sur le vu des mémoires. Le copropriétaire d’un fossé mitoyen peut en faire l’abandon pour se décharger des frais d’entretien, si le voisin refuse l’abandon, il faut en faire dresser un acte authentique et le notifier par huissier ; celui qui agit ainsi supporte les frais ; quand l’abandon est effectué, l’autre propriétaire est obligé de curer et entretenir le fossé d’une manière convenable ; l’abandon n’est censé fait que sous cette condition. Le copropriétaire d’un fossé ne peut obliger l’autre à lui en céder la mitoyenneté, quelle que soit l’indemnité proposée. Un voisin ne peut, non plus, obliger l’autre à établir un fossé pour limiter ou clore leurs héritages ; en cas de refus, celui qui veut faire un fossé doit le prendre en totalité sur son terrain, en ayant soin de rejeter toutes les terres de son côté. — Les berges et haies, les bois et arbres qui se trouvent le long d’un fossé mitoyen, ne sont pas communs, mais appartiennent exclusivement au voisin qu’ils touchent immédiatement. — Les fossés mitoyens à eau donnent des produits, tels que la vase et les poissons, qui se partagent par égale portion, entre les copropriétaires ; ils peuvent se contraindre respectivement à curer et à pêcher ; mais l’un ne doit point faire cette opération sans le consentement de l’autre.

Lorsque l’un des riverains d’un fossé fait une entreprise sur le fossé ou sur son franc-bord, dans le but de s’en faire attribuer la mitoyenneté ou la propriété exclusive, p. ex., en cultivant le franc-bord, en curant seul et en profitant de toute la vase, etc., l’autre peut intenter contre lui une action possessoire ; il en est de même s’il a comblé le fossé. — Quiconque a, en tout ou en partie, comblé un fossé servant de clôture, est passible d’un emprisonnement d’un mois à une année, et d’une amende égale au quart des restitutions et des dommages-intérêts, et qui, dans aucun cas, ne peut être au-dessous de 50 fr. Celui qui a à se plaindre de ce délit peut déposer sa plainte entre les mains du commissaire de police, du maire ou autre officier de police judiciaire, et, si des poursuites sont intentées, se porter partie civile, pour obtenir du tribunal correctionnel un dédommagement ; il peut aussi agir directement devant le tribunal civil. — Les actions possessoires relatives aux fossés doivent être portées devant les juges de paix, qui prononcent, sauf appel, à quelque valeur que s’élève la demande en dommages-intérêts ; ces magistrats jugent, sans appel, jusqu’à 100 fr., et à charge d’appel, à quelque somme que la demande s’élève, les actions relatives au curage des fossés, quand les droits de propriété ou de servitude ne sont pas contestés ; les questions de propriété des fossés doivent être déférées aux tribunaux de 1re instance (C. Nap., art. 666-669 ; C. pén., art. 456 ; C. de procéd., art. 23 ; L. du 25 mai 1838).

Pour les fossés qui bordent les routes et les chemins, Voy. Chemins vicinaux, Routes.

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