Feuilles

(Économie rurale). Les feuilles de la plupart des arbres sont très recherchées des bestiaux et peuvent être employées pour leur nourriture soit seules, soit mélangées avec du foin (Voy. Feuillée). Les feuilles des arbres résineux ont besoin d’être hachées et écrasées : on y ajoute un peu de sel et du son. Les feuilles de vigne empilées dans des tonneaux se conservent très bien pendant l’hiver : les bestiaux en sont très avides, et c’est une nourriture qui convient principalement aux chèvres (Voy. Chèvre). — Les feuilles sèches s’emploient comme litière (Voy. ce mot) pour garantir du froid les semis et les plantes délicates. On les répand sur les plantes sans les fouler, ou bien on recouvre celles-ci d’un châssis, d’une planche ou d’un paillasson soutenu sur de petites branches, et on jette par-dessus une couche épaisse de feuilles sèches. — Les feuilles décomposées et réduites en terreau forment un excellent fumier pour les pommes de terre et les arbres d’agrément. Les feuilles de chêne, de châtaignier et de hêtre sont les meilleures sous ce rapport : on en forme des tas que l’on foule avec soin et qu’on arrose de temps en temps ; il s’y développe bientôt une forte chaleur, et au bout de six semaines ou deux mois elles sont bonnes à être employées. — Voy. aussi Effeuillage.

Feuilles de Mûrier (Sériciculture). La feuille de toutes les variétés de mûrier est propre à la nourriture des vers à soie ; mais on préfère généralement la feuille du mûrier blanc (Voy. Mûrier). La feuille du mûrier contient, outre les éléments communs à toutes les feuilles, une matière sucrée et une matière résineuse. La matière sucrée est la partie qui contribue le plus à la nourriture des vers ; la matière résineuse contribue seule à la formation de la soie ; la meilleure feuille est celle qui contient le plus de ces deux substances ; on en peut juger par son seul aspect, qui doit être d’un beau vert franc, lisse et lustré. Quelquefois la feuille du mûrier se couvre d’une substance visqueuse, de saveur douce, connue sous le nom de miellée ; en cet état, elle est dangereuse pour les vers auxquels elle donne des diarrhées souvent mortelles. Dans ce cas, avant de distribuer la feuille, il faut la laver dans de l’eau très propre et la faire sécher avec soin. Quand la feuille est tachée de plaques couleur de rouille, elle est sans danger, parce que les vers s’abstiennent de toucher aux parties rouillées ; seulement les distributions doivent être plus abondantes, ce qui cause une perte sensible pour le magnanier. Les vers ne doivent jamais recevoir de feuille mouillée, soit par la pluie, soit par la rosée. Si pendant l’éducation il survient des pluies prolongées, il vaut mieux laisser les vers souffrir un peu de la faim : c’est un retard ; mais le résultat définitif n’en est pas compromis. Si l’on prévoit un temps pluvieux, il faut faire provision de feuilles, pour ne pas être pris au dépourvu. Enfin, si l’on est forcé de cueillir la feuille mouillée, il faut de toute nécessité la faire sécher. Elle sera à cet effet étendue sur le plancher d’une chambre, remuée vivement et lancée en l’air avec des fourches, rassemblée et changée de place avec des râteaux de bois, jusqu’à ce qu’il ne reste plus à la place occupée par les tas aucune trace d’humidité. Souvent, pour gagner du temps, on forme avec la feuille mouillée de grands tas qui s’échauffent promptement ; on les démonte aussitôt ; la fermentation passagère qu’ils ont éprouvée accélère le ressuyage de la feuille, sans la détériorer. Pour les petites éducations, on sèche très vite la feuille mouillée en en mettant 4 ou 5 kilogr. à la fois dans un grand sac de grosse toile. Deux ouvriers prennent le sac chacun par un bout et agitent vivement la feuille, qui cède à la toile du sac toute son humidité. Les vers provenant de l’éclosion de 30 grammes d’œufs consomment, dans le cours de leur éducation, 800 kilogr. de feuilles, ainsi répartis :

1er âge : feuille finement coupée et mondée : 3 kil. 500 gr.
2e âge : feuille préparée comme pour le 1er âge : 10 kil. 500 gr.
3e âge : feuille grossièrement hachée : 35 kil. 500 gr.
4e âge : feuille préparée comme pour le 3e âge : 105 kil. 500 gr.
5e âge : feuille entière : 646 kil. 500 gr.
Total : 800 kil. 500 gr.

Cette quantité de feuilles perd en moyenne, par l’épluchage, 85 kilogr., et par l’évaporation, 62. Si la feuille est pesée brute, au moment où elle est cueillie, il faut tenir compte de cet excédant, et calculer sur le pied de 950 à 1 000 kilogr. de feuille brute par once (30 gr.) de graine ou d’œufs de vers à soie. Cette quantité suffit amplement quand la feuille est saine et de bonne qualité ; mais s’il survient de la rouille ou toute autre cause grave de déchet, le magnanier qui n’a pas prévu ces accidents peut se trouver à court de provisions.

La récolte des feuilles exige quelques précautions indispensables pour le bon entretien des arbres et aussi pour tirer de la quantité de feuilles dont on dispose le meilleur parti possible. On doit dépouiller les arbres complètement ; s’il restait des feuilles aux extrémités de quelques branches, celles-ci attireraient trop fortement la sève, au détriment de la végétation du reste de la branche. Les arbres les plus jeunes doivent être dépouillés les premiers pour leur laisser le temps de refaire leur second feuillage et d’aoûter le jeune bois de leur seconde pousse. Il est d’ailleurs de l’intérêt du magnanier de réserver pour la fin de l’éducation la feuille des vieux arbres qui contient plus de principe résineux, et donne une meilleure soie. La cueillette ne doit commencer le matin que quand le soleil a dissipé la rosée ; elle doit cesser avant le coucher du soleil. On doit cueillir les feuilles en les tirant de bas en haut ; si on les tirait en sens contraire, elles se détacheraient plus aisément, mais on détruirait une partie des bourgeons placés dans leurs aisselles, et le jeune bois recevrait des écorchures qui compromettraient l’avenir des arbres. On emploie pour la cueillette, des sacs dont l’orifice est cousu à un cerceau de bois muni d’un crochet ; ces sacs, à mesure qu’ils sont pleins, sont vidés dans des charrettes pour les transporter des champs à la magnanerie. Pendant ce transport, on couvre la masse de feuilles de mûrier avec des branches de chêne, d’orme ou de châtaignier garnies de tout leur feuillage, afin de les préserver de l’action desséchante des rayons solaires.

Feuilles mortes (Législation). L’enlèvement des feuilles mortes existant sur le sol des forêts donne lieu à des amendes fixées ainsi qu’il suit : par charretée ou tombereau, de 10 à 30 fr. par chaque bête attelée ; pour chaque bête de somme, de 10 à 15 fr. ; pour chaque charge d’homme, de 2 à 6 fr. Il y a lieu, en outre, à la restitution des feuilles enlevées ou de leur valeur, et, selon les circonstances, à des dommages-intérêts (C. forest., art. 144 et 198.)

Feuilles volantes (Droit, Législation)

Quand l’emploi n’en est pas défendu, comme il l’est, p. ex. pour les actes de l’état civil (Voy. cet article), on ne doit en faire usage qu’en prenant des précautions contre la perte des écrits de cette nature. Il faut séparer des autres papiers qu’on peut avoir, et mettre en lieu sûr les feuilles volantes, mêmes les feuilles de papier timbré qui peuvent contenir des obligations ou des libérations. Si on écrit son testament olographe sur une feuille volante, on doit éviter de le laisser entre les feuilles d’un livre ou d’un registre, ou de le mêler à d’autres papiers, ou de le serrer dans des tiroirs ou dans des meubles où il n’est pas ordinaire de mettre des papiers, ou dans des parties d’habitation où il courrait risque soit d’être facilement enlevé, soit d’être difficilement trouvé. Il faut le mettre sous une enveloppe, en écrivant dessus : ceci est mon testament, ou mieux encore, remettre la feuille volante sur laquelle on l’aurait écrit, dans l’étude d’un notaire, en laissant parmi ses papiers la mention de l’existence de ce testament et du dépôt qu’on en aurait fait. On peut aussi donner à des volontés dernières écrites sur feuilles volantes la garantie de la forme mystique. Voy. Testament mystique, Testament olographe.

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