Délégation

(Droit). Elle a lieu quand un débiteur, pour s’acquitter en tout ou en partie, délègue à son créancier une tierce personne qui s’oblige à sa place ; si cette tierce personne ne participe point à cet arrangement, ne s’engage pas, il n’y a de la part du débiteur que l’indication d’une personne qui payera pour lui. Voy. Indication de payement.

Le débiteur qui a fait une délégation n’est pas par cela même libéré ; le créancier est censé avoir accepté le débiteur délégué comme une garantie de plus ; pour que le débiteur primitif ne puisse plus être poursuivi par le créancier, il faut que celui-ci ait déclaré expressément qu’il entendait décharger le débiteur qui lui a fait la délégation (C. Nap., art. 1275). Cette déclaration expresse résulterait suffisamment de ce que le créancier aurait dit, dans l’acte, accepter le délégué comme son seul débiteur, ou se contenter de l’obligation de ce délégué. Lorsque le créancier a ainsi déchargé le débiteur qui lui a fait la délégation, il n’a point de recours contre lui si la nouvelle personne déléguée devient insolvable, à moins que l’acte n’en contienne la réserve expresse, ou que cette personne ne soit déjà en faillite ouverte ou en déconfiture lors de la délégation (C. Nap., art. 1276). — Ordinairement la personne déléguée est un débiteur de la personne qui fait la délégation ; mais cela n’est pas nécessaire. La personne déléguée peut, sans rien devoir au débiteur, consentir envers le créancier à payer la dette ; elle fait alors une libéralité, ou bien ouvre un crédit. Par suite de la délégation, celui qui a été délégué ne doit plus rien à celui qui l’a délégué ; il n’est plus tenu qu’envers le créancier qui a accepté la délégation ; il s’ensuit qu’il ne peut faire valoir contre celui-ci les moyens qu’il aurait eus ou qui lui surviendraient pour refuser de payer le déléguant. — Si la délégation a été faite sous la condition que tel événement arrivera ou n’arrivera pas, elle ne libère ni le débiteur envers son créancier originaire, ni le débiteur délégué envers celui qui a fait la délégation, tant que la condition n’a pas été accomplie.

Les délégations de créances à termes payent un droit d’enregistrement de 1 p. 100, plus le décime. L’acceptation de la personne déléguée donne lieu à un droit fixe de 1 fr. Il en est de même de celle du créancier si elle a lieu dans un acte séparé ; mais elle ne supporte aucun droit si elle est donnée dans l’acte même de délégation. Il est dû 2 p. 100 sur les délégations de rentes perpétuelles ou viagères et de pensions à titre onéreux. — Le droit fixe de 1 fr. est seul perçu pour une délégation de créances dans un acte de vente ou de donation, pourvu que les titres de ces créances soient énoncés comme avant été enregistrés ; sinon il serait dû un droit proportionnel d’obligation (L. du 22 frim. an vii ; délibér. de la régie du 20 déc. 1823 et 10 mai 1833 ; instr. génér. du 31 déc. 1838).

Les délégations peuvent se faire par acte sous seing privé aussi bien que par acte notarié.

Formule. — Entre les soussignés Jean N… (qualité ou profession et demeure) d’une part ; Charles N… (profession ou qualité et demeure) d’autre part ; et Joseph N… (profession ou qualité) encore d’autre part ; il a été dit, fait et convenu ce qui suit :

M. Jean N… est débiteur de … (la somme en toutes lettres) envers M. Charles N… (mentionner la cause et le titre de la créance), et, en même temps, il est créancier pour pareille somme (ou pour la somme de … si la somme déléguée n’était pas égale à la créance qu’elle a pour but d’éteindre ou d’atténuer ; — énoncer le titre et la cause de la créance). Pour se libérer envers M. Ch. N… de la somme de … qu’il lui doit, M. Jean N… lui a, par le présent acte, délégué, cédé et transporté (si le recouvrement de la créance déléguée n’est pas garanti, on met 🙂 sans autre garantie que celle de ses faits et promesses ; si le recouvrement est garanti, on dit : avec toute garantie, même de payer dans le cas où le débiteur ne payerait pas) sa créance de la somme de … sur M. Joseph N…

Au moyen de la présente délégation, M. Jean N… met et subroge M. Charles N… dans tous ses droits et actions contre M. Joseph N…

De son côté, M. Charles N…, qui accepte la présente délégation, déclare tenir M. Jean N… entièrement quitte, et le décharge expressément de sa dette, consentant à avoir pour seul et unique débiteur M. Joseph N… (s’il y a garantie du recouvrement, exprimer qu’à défaut de payement de la somme déléguée, le créancier pourra exercer tous ses droits contre le débiteur, et poursuivre sa créance soit cumulativement, soit séparément contre le débiteur déléguant, soit contre le délégué). M. Jean N… reconnaît que M. Charles N… lui a remis son titre (indiquer la nature du titre) : de son côté, M. Charles N… reconnaît que M. Jean N… lui a remis son titre de créance sur M. Joseph N…

En même temps, M. Joseph N… déclare accepter la délégation faite sur lui par M. Jean N… au profit de M. Charles N… et se la tenir pour bien et valablement signifiée ; en conséquence, il reconnaît M. Charles N… pour son nouveau créancier de la somme de … en capital et intérêts, ainsi qu’il résulte de la présente délégation.

Fait triple à … le … (Date et Signatures).

[Si la délégation n’a été d’abord convenue qu’entre le créancier et son débiteur déléguant, l’acceptation du débiteur délégué peut être donnée soit à la suite de l’acte, soit par un acte séparé. De même le créancier à qui une délégation a été faite par un acte passé entre son débiteur et un débiteur de celui-ci, peut accepter à la suite de cette convention ou par un acte séparé].

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