Concordat

(Droit). Il ne peut avoir lieu qu’après le jugement qui a fixé l’ouverture de la faillite ; un arrangement fait entre un commerçant et les créanciers sans déclaration préalable de faillite, serait un atermoiement (Voy. ce mot), et non un concordat. — Pour que le failli puisse obtenir un concordat, il faut qu’il vienne en personne pour faire ses propositions aux créanciers, et leur donner des renseignements ; il ne peut se faire représenter que pour des motifs dont le juge commissaire apprécie la validité. Si c’est une société qui est tombée en faillite, les créanciers peuvent n’accorder un concordat qu’à un ou plusieurs des associés. Pour que le concordat soit valable et obligatoire, il faut qu’il ait été consenti par un nombre de créanciers formant la majorité et représentant les trois quarts de la totalité des créances, vérifiées et affirmées, ou admises provisoirement. Ont le droit de voter sur le concordat, les créanciers dont les créances ont été vérifiées et affirmées, et ceux dont les créances contestées ont été admises provisoirement, jusqu’à concurrence d’une certaine somme. Les créanciers privilégiés, hypothécaires inscrits ou dispensés d’inscription, ou nantis d’un gage, peuvent assister à la délibération, mais sans y avoir voix délibérative, à moins qu’ils ne renoncent à leurs privilèges, hypothèque ou nantissement, renonciation qui résulterait du fait seul de leur vote dans la délibération. S ’il ne se forme pas pour le concordat une majorité telle que la loi l’exige, la délibération est remise à huitaine, et les résolutions de la première assemblée demeurent sans effet. Le concordat doit être signé séance tenante, à peine de nullité. On ne peut accorder un concordat à un banqueroutier frauduleux, mais bien à un failli condamné comme banqueroutier simple.

Tous les créanciers ayant eu droit de concourir au concordat, ou dont les droits ont été reconnus depuis, peuvent y former opposition ; cette opposition doit être motivée et signifiée par un acte d’huissier aux syndics et au failli, à peine de nullité, dans la huitaine qui suit le concordat, avec assignation à la première audience du tribunal de commerce, lequel peut accorder ou refuser l’homologation. Le concordat peut être annulé à l’égard de tous les créanciers même sur l’opposition d’un seul.

Dès que le concordat a été homologué par le tribunal, il est obligatoire pour tous les créanciers, même ceux domiciliés hors de France. Il a pour conséquence, vis-à-vis du failli, de le remettre à la tête de l’administration de ses biens, et d’empêcher les poursuites sur sa personne et sur ses propriétés, pour la portion de dettes dont il lui a été fait remise. Les créances telles qu’elles résultent du concordat, sont garanties par une hypothèque judiciaire, fondée sur le jugement déclaratif de la faillite ; à cet effet les syndics font inscrire le jugement d’homologation, et l’inscription assure aux créanciers, même chirographaires, pour sûreté des dividendes stipulés au concordat, une préférence sur tous les immeubles présents et à venir du failli, à l’égard des créanciers postérieurs à l’ouverture de la faillite. L ’inscription ne profite pas à ceux des créanciers qui ne se sont pas fait connaître. Chaque créancier qui veut empêcher la péremption, doit renouveler l’inscription au bout de 10 ans. — Quoique ayant été homologué, le concordat peut être annulé, sur la demande de tout créancier, pour deux causes, à savoir : la dissimulation de l’actif, et l’exagération du passif. En outre, chaque créancier peut demander que le concordat soit résilié s’il n’a pas été exécuté, et le jugement qui ordonne la résolution produit son effet à l’égard de tous ; les créanciers peuvent ensuite accorder au failli un nouveau concordat. Lorsque le concordat a été résilié pour défaut d’exécution, les cautions qui ont garanti les obligations contractées par le débiteur failli, ne sont pas déchargées.

Il n’est permis à aucun créancier d’employer des manœuvres pour faire sa condition meilleure au préjudice des autres ; la loi punit d’un emprisonnement qui peut s’élever à une année, et d’une amende qui peut être portée à 2 000 fr., le créancier qui a stipulé du failli ou d’un tiers un avantage particulier pour ne pas consentir au concordat ou ne pas y former opposition ; l’emprisonnement peut même être de 2 ans, si le créancier est syndic de la faillite. Les conventions illégales dont il vient d’être parlé sont nulles, à l’égard de toutes personnes, même à l’égard du failli. Il en est de même pour tout traité, par lequel un créancier obtient du failli un avantage au détriment de la masse. La peine n’atteint que le créancier ; le failli et le tiers qui sont intervenus n’en sont point passibles, et peuvent demander la nullité du traité, ainsi que la restitution des sommes qu’ils auraient payées.

Le concordat se fait dans une réunion présidée par le juge commissaire de la faillite, assisté de son greffier ; l’acte peut être rédigé sous seing privé, et doit porter la signature de tous les créanciers qui l’ont consenti. L’adoption du concordat se constate par un procès-verbal, qui est dressé par le juge commissaire de la faillite.

Un concordat passé après la déclaration de faillite et dans les formes exigées par la loi, est passible d’un droit fixe d’enregistrement de 13 fr. 50 c. ; un arrangement amiable, qui n’est pas un concordat proprement dit, intervenu sans déclaration préalable de faillite, donne lieu à un droit proportionnel de 50 c. pour 100 fr., sur les sommes que le failli s’oblige à payer. Le cautionnement, par un tiers, donné par un débiteur concordataire, ne supporte qu’un droit fixe de 4 fr. 50 c. ; il est passible du droit proportionnel de 50 c. pour 100 fr., si le cautionnement a été fait pour un arrangement amiable non conforme à la loi des faillites. (Loi du 24 mai 1834 ; C. de comm., art. 504-526.)

Concordat par abandon. En droit, le concordat devrait toujours être accordé au commerçant malheureux et de bonne foi, qui présente un actif raisonnable ; mais en fait il n’en est pas toujours ainsi. Trop souvent les créanciers se montrent faciles sur l’octroi du concordat quand il n’y a rien ou presque rien dans une faillite, tandis qu’ils se forment en contrat d’union alors que la liquidation immédiate d’un actif considérable peut leur offrir des ressources importantes, ou qu’ils ont intérêt à conserver contre le failli le droit de le poursuivre ultérieurement. D’un autre côté, le concordat a ce désavantage que l’administration défectueuse du failli concordataire peut faire évanouir l’actif, gage commun des créanciers. Le concordat par abandon qui tient le milieu entre le concordat ordinaire et l’union obvie à ces inconvénients. Il diffère du concordat ordinaire en ce que le failli n’est pas replacé dans l’administration de ses biens. Les créanciers s’emparent de l’actif qui est liquidé par des mandataires investis de leur confiance ; mais tandis que l’union laisse le failli aux prises avec les réclamations de ses créanciers, le concordat par abandon lui rend sa capacité, sa liberté d’action, le dispense du jugement d’excusabilité, et entraîne sa libération. Le concordat par abandon, comme le concordat ordinaire, doit être voté par la majorité des créanciers en nombre, et par les trois quarts en somme. L’homologation du tribunal est nécessaire. Comme le concordat, il peut être annulé et résolu. Les précautions prises dans l’union pour la nomination des syndics sont également obligatoires (C. de comm., art. 541 ; Loi du 26 juin 1856).

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