Compte

(Droit). On le doit à toute personne dont on a géré les biens ou les affaires, quand la gestion est terminée. Tant que le compte n’est pas rendu, celui qui le doit est censé débiteur ; mais on ne peut faire aucun acte d’exécution contre lui tant qu’on ne l’a pas fait condamner à rendre compte. La reddition de compte peut être exigée par les créanciers de celui à qui le compte est dû ; le comptable lui-même peut, dans la vue de décharger sa responsabilité, poursuivre devant les tribunaux la reddition de son compte, en assignant celui à qui il est dû pour qu’il ait à le recevoir. — Si l’une des parties est mineure ou interdite, le compte ne peut être rendu qu’en justice ; mais si toutes les parties sont majeures et maîtresses de leurs droits, elles peuvent rendre et recevoir un compte à l’amiable, et même par un acte sous seing privé fait double. Aucune forme spéciale n’étant prescrite pour les comptes rendus à l’amiable, les parties peuvent les rédiger comme il leur convient. En tous cas, elles doivent y rappeler les faits, établir un chapitre des recettes, un chapitre des dépenses par ordre de date, une balance des recettes et dépenses ; on porte à part les objets à recouvrer. Quand un compte a été arrêté, il ne peut plus être révisé ; seulement les parties peuvent demander devant les tribunaux la rectification pour cause d’erreur, omission, faux emploi ou double emploi ; cette demande se prescrit par le laps de 10 ans. Voy. Arrêté de compte.

Lorsque dans un compte, la recette balance la dépense, il n’est dû qu’un droit fixe d’enregistrement de 2 fr. Si le comptable reste débiteur ou créancier, le droit est de 1 pour 100 sur le reliquat. Un droit de libération de 50 c. par 100 fr. est dû : 1° lorsque l’arrêté de compte constate le remboursement, par le comptable, de sommes provenant des recettes qu’il avait employées à son usage personnel ; 2° lorsque le payement du reliquat de compte a lieu par acte postérieur à l’arrêté définitif ; 3° lorsque le compte établit que le comptable a retenu une somme pour émoluments. Sont dispensés de l’enregistrement, les quittances de fournisseurs, ouvriers, maîtres de pension et autres de même nature, produites à l’appui des comptes (C. de proc. civ., art. 527 et suiv. ; L. du 22 frim. an vii, et du 28 avril 1816).

Erreur de compte. Voy. Erreur.

Compte courant (Commerce, Législation)

Il est particulièrement pratiqué entre commerçants. Il se constate par les livres de commerce ; on porte sur le grand-livre ou livre d’ordre, au crédit les valeurs qu’on a fournies, et au débit celles qu’on a reçues. Les sommes prêtées en compte courant portent de plein droit intérêt au taux légal à dater du jour des avances ; les intérêts se capitalisent d’année en année. De plus, les banquiers qui font des avances par compte courant peuvent percevoir une commission, pourvu qu’elle ne soit pas excessive, ni en dehors des usages du commerce et de la place. Souvent pour éviter des calculs d’intérêts compliqués, les parties conviennent que le compte roulera sur une somme déterminée et que l’intérêt sera dû sur la totalité de cette somme, encore qu’elle n’ait pas été perçue. La loi autorise cette convention, bien qu’elle serve quelquefois à déguiser l’usure. Dans ce cas, il faut toujours que la somme mentionnée soit tenue à la disposition de celui à qui le compte est ouvert, sans quoi la cause de l’intérêt n’existerait pas et il y aurait lieu à une action en dommages-intérêts (Voy. Banque, Change, Lettre de crédit, etc.). Dans l’usage les comptes courants sont ordinairement arrêtés à la fin de chaque année. Ce règlement ne fait pas cesser le compte courant ; le reliquat, s’il y en a, est porté de nouveau au crédit ou au débit, jusqu’à ce que les parties conviennent de faire cesser le compte et d’en solder le reliquat. Le compte courant est arrêté par la faillite qui empêche d’y passer les valeurs envoyées ultérieurement au failli.

L’une ou l’autre partie peut demander quand il lui convient la balance du compte et le payement du reliquat ; celui qui se trouve débiteur doit remettre ou envoyer à l’autre des valeurs en payement, sinon le créancier peut se couvrir en tirant sur son correspondant. Le solde d’un compte courant ne se prescrit que par 30 ans ; il en est de même des billets, et lettres de change entrés dans ce compte, et qui ordinairement sont prescrits par 5 ans. Cette modification ne s’étend pas toutefois jusqu’à en suspendre l’exigibilité : le débiteur d’un billet ou d’une lettre de change ne serait pas admis à refuser ou à ajourner le payement jusqu’à l’apurement du compte courant. Voy. Banque de France.

Compte de retour (Commerce, Finances)

Voy. Retraite.

Compte de tutelle

Il est dû par tout tuteur, (C. Nap., art. 469), et même par toute personne qui, sans avoir la qualité de tuteur, a néanmoins administré des biens de mineur. Personne, pas même le père ou la mère, n’a le droit de dispenser le tuteur de rendre compte. — Le compte est rendu : 1° au pupille, si celui-ci est devenu majeur ou a été émancipé, et, en cas de mort, à ses héritiers ; 2° au nouveau tuteur, si le tuteur est excusé ou destitué ; s’il est mort, ce sont ses héritiers qui rendent compte au nouveau tuteur. Le compte du dernier tuteur doit comprendre celui de toutes les gestions antérieures. — Le tuteur ne doit son compte qu’à la fin de sa gestion (art. 469). Seulement, dans le cours de la tutelle, si elle n’appartient pas au père ou à la mère, il peut être obligé par le conseil de famille de remettre au subrogé-tuteur, à des époques déterminées, mais jamais plus d’une fois par an, des états de situation de sa gestion. Ces états sont remis, sans frais, sur papier non timbré, et sans aucune formalité de justice (art. 470). Les comptes soit du tuteur au pupille, soit de tuteur à tuteur, peuvent indifféremment être rendus par acte sous seing privé, fait en double, devant notaire ou devant arbitres. Si le compte donne lieu à des contestations, elles sont poursuivies et jugées comme les autres contestations en matière civile (art. 473). Le conseil de famille n’a point à intervenir dans ces débats. L’action qui a pour objet de forcer un tuteur à rendre compte doit se poursuivre devant le tribunal du lieu où la tutelle a été déférée. — Si le mineur a été émancipé, il faut, pour recevoir le compte de son tuteur, qu’il soit assisté de son curateur (art. 480) ; la présence du subrogé tuteur est nécessaire pour les comptes de tuteur à tuteur.

Le compte a pour point de départ l’inventaire qui a été dressé lors de l’ouverture de la tutelle. Il présente un chapitre des recettes et un chapitre des dépenses, et, de plus, s’il y a lieu, un chapitre des recouvrements à effectuer et des dettes à acquitter. — Dans le chapitre des recettes, on comprend l’actif porté à l’inventaire, les capitaux remboursés, les revenus et les fruits des biens, les intérêts des sommes placées, et, s’il y a lieu, les intérêts des intérêts, les intérêts dus par le tuteur pour défaut d’emploi des sommes touchées, les bénéfices provenant de l’industrie du mineur, les dommages-intérêts encourus par le tuteur pour fautes commises dans sa gestion. — Le tuteur a le droit de se faire allouer toutes les dépenses suffisamment justifiées, et dont l’objet est utile (art. 471) ; il comprend donc, sauf justification, dans le chapitre des dépenses, l’entretien, la nourriture, l’éducation du mineur, les réparations, impôts, frais de conservation, intérêts de capitaux, arrérages payés, remboursements, frais de scellés et inventaire, les frais de compte, dont le tuteur doit faire l’avance (art. 471), les dépenses imprévues, les honoraires des gérants salariés, et même ceux du tuteur, si le conseil de famille en a accordé, sinon ses frais de voyage, avances, etc. Les pères et mère ne doivent pas comprendre dans leurs dépenses les charges de l’usufruit légal des biens de leurs enfants jusqu’à l’âge de 18 ans de ceux-ci (art. 985), ou jusqu’à leur émancipation. Le tuteur n’est astreint à aucun mode particulier de justification de ses dépenses ; si elles étaient contestées, les tribunaux prononceraient. Les menues dépenses n’ont pas besoin de justification ; il suffit que le tuteur affirme les avoir faites. Le compte n’est pas sujet à révision, sauf à réclamer en justice pour erreur ou omission, faux ou double emploi. — S’il y a un reliquat de compte, la somme à laquelle il s’élève porte intérêt, mais d’une manière différente selon qu’il est dû par le tuteur ou par le mineur. Si le reliquat est dû par le tuteur, il porte intérêt sans demande, à partir de la clôture du compte (art. 474) ; bien entendu que si le tuteur a tardé ou refusé de présenter son compte, et qu’il ait fallu le poursuivre à cet effet, les intérêts courront à partir du jour de la demande. Si le tuteur ne paye pas le reliquat de son compte, la contrainte par corps peut être prononcée contre lui (C. de proc., art. 126). Si le reliquat est dû par le mineur, les intérêts ne courent que du jour de la sommation de payer faite après la clôture du compte (C. Nap., art. 474).

Le tuteur doit remettre son compte au pupille avec les pièces justificatives, et celui-ci lui doit un récépissé enregistré de cette remise, avec mention des pièces communiquées. Ces formalités sont nécessaires pour l’effet définitif des conventions auxquelles la reddition de compte peut donner lieu entre le majeur et son ex-tuteur. Tout traité qui interviendrait entre eux serait nul s’il n’avait été précédé de la reddition d’un compte détaillé et appuyé des pièces, comme il vient d’être dit, le tout constaté par le récépissé, qui doit être donné dix jours au moins avant le traité (art. 472). Par ces mots tout traité, il faut entendre toute convention, tout acte qui aurait pour conséquence de décharger le tuteur de l’obligation de rendre compte de son administration, en tout ou par partie, ou pour certains objets déterminés. La prohibition de traiter avant d’avoir accompli les formalités légales de la reddition de compte s’appliquerait à la mainlevée que le mineur donnerait de son hypothèque légale. On ne devrait pas suivre la rigueur de la loi, et exiger un compte préalable, dans le cas où le mineur n’aurait eu aucun ou presque aucun bien à administrer. — Après dix ans, à compter de la majorité, le mineur ne peut plus actionner son tuteur relativement aux faits de la tutelle (art. 475). Cette prescription s’applique à la demande en reddition de compte. — Les dix ans accordés au mineur pour demander compte à l’ancien tuteur des faits de la tutelle ne courent qu’à partir de la majorité, alors même que le mineur, ayant été émancipé, aurait reçu le compte de la tutelle en présence de son curateur. — Le tuteur pourrait opposer la prescription de dix ans à une demande qui, en acceptant, tel qu’il a été rendu, le compte de la tutelle, voudrait revenir indirectement sur des faits de tutelle, p. ex. en réclamant une indemnité à raison d’une faute commise dans la gestion. Mais si le mineur attaquait le compte en lui-même comme contenant erreur, omission, double ou faux emploi, on ne pourrait le repousser que par une prescription de 30 ans à partir de la reddition du compte. Dans tous les cas où il y aurait eu fraude de la part du tuteur, la prescription ne pourrait courir contre le mineur qu’à compter de la découverte de la fraude. — Lorsque le compte arrêté est régulier, et non contesté, et que le mineur y est constitué créancier, il peut poursuivre le payement contre le tuteur, pendant 30 ans à partir de l’arrêté de compte, ou du jugement qui a ordonné que le compte serait rendu. Le tuteur a le même temps pour réclamer si le reliquat du compte est en sa faveur. — Si le pupille ne demande pas son compte, le tuteur a le droit de l’obliger à le recevoir et à en payer le reliquat, s’il y a lieu. Cette action n’est pas comprise par la loi dans la prescription de 10 ans : aussi accorde-t-on généralement 30 ans au tuteur pour l’exercer. Si le compte a été arrêté, avec un reliquat au profit du tuteur, ce reliquat constitue une créance, qui peut être réclamée pendant 30 ans, à partir de la majorité de l’ancien pupille.

Le compte de tutelle n’est soumis qu’à un droit fixe d’enregistrement de 1 fr. plus le décime de guerre. Si, après l’arrêté définitif, il y a un reliquat non soldé définitivement, il est dû des droits d’obligation de 1 p. 100. La mention, dans le compte, de quittances sous seing privé non enregistrées donne lieu à un droit de 50 c. pour 100 fr. sur le montant des sommes acquittées, excepté pour les quittances de fournisseurs, ouvriers, maîtres de pensions, et autres de même nature, produites comme pièces justificatives, et qui sont dispensées de l’enregistrement (C. de proc. civ., art. 537).

Formules. — 1° Récépissé du compte, donné par le mineur, soit séparément, soit à la suite du compte remis par le tuteur.

Je soussigné (nom, prénoms, profession, demeure), reconnais que M… mon tuteur, m’a remis ce jourd’hui le compte ci-dessus de l’administration de mes biens, avec toutes les pièces à l’appui.

À… le… (Signature.)

2° Arrêté de compte, qui peut être écrit à la suite du récépissé.

Moi (nom, prénoms du mineur) reconnais avoir examiné le compte à moi rendu par M… mon tuteur, ainsi que toutes les pièces à l’appui ;

Je déclare approuver ce compte dans toutes ses parties, et en arrêter définitivement avec M… le reliquat à la somme de… que je reconnais avoir reçue en espèces ; ainsi que tous les titres de propriété ou de créance, et tous autres qui m’appartiennent ; en conséquence, je déclare, déchargé M… de toutes choses quelconques au sujet dudit compte, déclarant n’avoir rien à lui réclamer, et être prêt à un donner main levée de toutes inscriptions d’hypothèque légale à sa réquisition.

Fait double à… (Date et Signatures.) [S’il n’y a point de reliquat, parce que les recettes et les dépenses se balancent, l’arrêté en fait mention ; il exprime de même si le reliquat est au profit du tuteur. Lorsque le reliquat n’est pas payé immédiatement par celui qui le doit, il est bon d’indiquer les termes de payement].

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