Charbon

(Exploitation des bois, Économie domestique). Le meilleur bois pour la fabrication du charbon est le rondin de chêne de 0m,15 à 0m,30 de circonférence, provenant d’un taillis de 15 à 18 ans. On fait également du charbon avec le pin, le hêtre, le charme, le bouleau et les bois blancs ; ces derniers ont une valeur moindre. Lorsque le bois est trop gros, on le refend en quartiers : celui-ci est toujours inférieur au rondin. Dans l’exploitation des hauts taillis de 30 à 50 ans et dans celle des futaies, on consacre souvent à la fabrication du charbon les branches et les brins impropres à fournir du bois de corde. — Les mois d’août, de septembre et d’octobre sont l’époque la plus favorable pour cuire, c.-à-d. pour convertir en charbon les bois abattus pendant l’hiver qui a précédé ces mois. On cuit dans les fourneaux de 10 à 20 stères de bois à la fois. L ’opération dure environ 4 jours, depuis le moment où le feu a été allumé. — Le charbon de tiges et de racines de bruyères, très usité dans le midi de la France, est dur et brûle lentement ; mais il se couvre de cendres, ce qui diminue beaucoup son ardeur.

Le bon charbon doit être dur, résonner quand on le remue, et ne pas tomber en poussier. Le charbon de bois se vend ordinairement au sac ou à la voie, au prix de 7 à 9 fr. ; mais il est plus profitable de l’acheter au poids, parce qu’il peut se trouver dans la mesure quelques longs morceaux qui font des vides préjudiciables à l’acheteur. En moyenne, un mètre cube de charbon de chêne et de hêtre pèse de 140 à 150 kilogr. ; de bouleau, de 120 à 130 kilogr. ; de pin, de 100 à 110 kilogr. — À Paris, le charbon de bois s’achète, soit sur les marchés publics dits flottants, soit dans les chantiers.

Marchés flottants. Le commerce de charbon de bois par eau a des marchés publics établis :

1° sur la rive droite de la Seine : quai d’Orléans (île Saint-Louis), au pont de la Tournelle ; quai de la Grève (Hôtel-de-Ville), au pont d’Arcole, et quai de l’École (Louvre), au pont des Arts ;

2° sur la rive gauche de la Seine : quai Malaquais, au pont des Saints-Pères ; et quai d’Orsay (Corps Législatif), au pont de la Concorde ;

3° sur le canal St-Martin : quai Valmy (faubourg du Temple), en face la rue Rampon.

Ces ports à charbon sont les seuls qui soient autorisés et reconnus par l’administration ; ils font partie du service général de l’approvisionnement de la ville de Paris.

On y trouve des charbons de toutes provenances et de qualité supérieure, charbons de l’Yonne, des canaux, de la Marne, de la Loire et de l’Allier. — La vente se fait à l’hectolitre dans les prix de 3 à 5 fr. pour les charbons petits et moyens, de 1 fr. 75 c. à 2 fr. pour les poussiers et de 1 fr. 50 c. environ pour les fumerons. Les variations dont ces prix sont susceptibles sont peu considérables : du reste l’acheteur peut toujours consulter les tarifs affichés dans le bateau. — La vente est directe du producteur au consommateur, soit en gros soit au détail.

Le portage du charbon étant libre, le consommateur peut faire enlever sa provision par une personne de confiance. — Le mesurage offre toute garantie ; il est fait sous la surveillance des préposés du poids public.

Chantiers. — Prix des 100 kilos (rendus franco).

N° 1 Gros … 22 fr. » c.
N° 2 Moyen … 20 » c.
N° 3 Petit … 18 » c.
N° 4 Grenaille … 15 » c.
N° 5 Fumerons … 10 »

Les sacs dans lesquels le charbon est transporté doivent peser 40 kilos.

Le charbon doit être tenu à l’abri de l’humidité. On peut en faire une assez grande provision à la fois, si l’on a un lieu sec pour le placer. Ce qu’il y a de mieux c’est d’avoir un charbonnier bien clos, carrelé, et dans lequel on ne pénètre que pour prendre ou déposer le charbon. On doit exiger des domestiques qu’ils prennent le charbon à la pelle de manière que les gros morceaux soient mêlés avec le petit charbon et le poussier : ces derniers ne brûlent que difficilement lorsqu’ils sont employés seuls.

Le charbon ne s’emploie pas seulement comme combustible ; on met à profit ses propriétés décolorantes et désinfectantes pour le filtrage des eaux (Voy. Filtre), la décoloration du vinaigre, du sucre, du miel, etc., la conservation des aliments ; la médecine l’emploie comme antiseptique (Voy. Dentifrices, Haleine, Ozéne) ; l’agriculture, comme engrais : mêlé aux semences, en petite quantité, il active la végétation dans les terres grasses et humides et dans les terres crayeuses et légères ; il rend plus légère la terre des jardins et la débarrasse quelquefois des insectes nuisibles.

Charbon d’os ou Ch. animal. Voy. Noir animal.

Charbon de terre. Voy. Houille et coke.

Charbon (Médecine)

Le Charbon (Anthrax malin), et toutes les affections charbonneuses qui lui ressemblent, ne sont pas, en raison même de leur extrême gravité, du nombre des maladies que la médecine domestique puisse entreprendre de traiter. Mais, assez souvent à la campagne, le Charbon des bestiaux (Voy. ci-après) se communique à l’homme dans des localités écartées où il est impossible de procurer sans retard au malade les secours de la médecine. Dans ce cas, on devra immédiatement débrider la tumeur par une incision cruciale et y faire une application de beurre d’antimoine, ou, à défaut, de feuilles de noyer broyées et pilées ; en même temps on tâchera de provoquer le vomissement par l’eau tiède et l’introduction dans le gosier des barbes d’une plume trempée dans l’huile, et on joindra à ce traitement des lavements purgatifs fréquemment renouvelés. Ce sont là les seuls moyens qu’il soit possible de hasarder en attendant le médecin, qu’il faut néanmoins appeler en toute hâte, car les progrès du mal sont excessivement rapides. — Pour prévenir ces accidents redoutables, les habitants de la campagne devraient, toutes les fois qu’ils rencontrent des cadavres d’animaux abandonnés dans les champs, avoir le soin de les enterrer profondément : en effet la plupart des affections charbonneuses proviennent de piqûres faites par des insectes qui ont sucé le sang corrompu de ces cadavres.

Charbon (Art vétér.)

Les bestiaux y sont plus sujets que le cheval. La malpropreté, le défaut d’air ou l’excès de chaleur des écuries, des étables et des bergeries, la mauvaise qualité des eaux et des aliments, en sont les causes les plus ordinaires. En outre, cette affection redoutable est éminemment contagieuse et, si l’on ne s’empresse d’isoler les animaux attaqués, le mal se communique aux autres avec une effrayante rapidité.

Charbon simple. Il est caractérisé par une élévation sensible et prompte sur la peau de l’animal, accompagnée d’une extrême chaleur. Bientôt le milieu de la tumeur s’affaisse, se remplit d’une humeur purulente, et la gangrène se manifeste en même temps. L’animal, le cheval surtout, est languissant et refuse toute espèce de nourriture. Dès que cette affection se déclare, il faut se hâter d’isoler l’animal. On rase le poil sur la tumeur et on y applique un onguent composé soit de mouches cantharides (15 gr.) et d’euphorbe (15 gr.), soit d’essence de térébenthine (15 gr.) et de sublimé corrosif (15 gr.), mêlés exactement dans 100 gr. d’onguent vésicatoire. Si le remède n’opère pas, on pratique plusieurs incisions profondes dans la tumeur et on y applique de nouveau le même onguent. On peut aussi la cautériser avec un fer rouge et, quand l’escarre est tombée, panser la plaie avec de l’eau-de-vie camphrée.

Charbon malin. Outre les caractères du charbon simple on remarque chez l’animal des symptômes de fièvre, des frissons et une vive chaleur aux oreilles, aux cornes et sur diverses parties du corps. Ce genre de charbon, étant très contagieux, il ne suffit pas d’isoler l’animal, il faut prendre les plus grandes précautions en le pansant ; le simple attouchement suffit quelquefois pour communiquer à l’homme cette affection gangreneuse. — Ce mal est si rapide que souvent le vétérinaire arrive trop tard pour y porter remède. En 12 ou 18 heures au plus l’animal peut succomber. On devra donc se hâter d’amputer toutes les tumeurs, ou de les cautériser avec un fer rouge, et d’appliquer ensuite sur la plaie soit de l’onguent antiputride au quinquina, soit celui qui est indiqué ci-dessus, ou à défaut, de l’eau-de-vie camphrée dans laquelle on aura fait dissoudre de l’aloès. Ces soins n’empêchent pas d’appeler en toute hâte le vétérinaire, qui seul peut prescrire le remède intérieur.

Charbon blanc, vulgairement Venin amassé. Il est caractérisé par des tumeurs qui surviennent sur toutes les parties du corps, et particulièrement sur l’épine du dos, les côtes et le ventre. La peau paraît détachée, soufflée ; elle cède au doigt qui la presse, et fait entendre une sorte de crépitation comme si c’était du parchemin que l’on roulât dans la main. Ces tumeurs sont ordinairement accompagnées d’un abattement général. Le frisson survient et bientôt après le froid des cornes et des oreilles. L’animal a la bouche sèche ; il ne fiente ni n’urine presque plus ; son haleine exhale une odeur infecte ; enfin, l’enflure ou le dévoiement le conduisent à la mort. Le traitement est le même que pour le charbon malin ; il faut seulement se garder de saigner l’animal.

Charbon à la langue, vulgairement Surlangue ou Chancre volant. Il se manifeste par une ou plusieurs vessies à la langue, d’abord blanches ou rougeâtres, bientôt livides et noires. Ces vessies se changent rapidement en ulcères chancreux, et l’humeur qu’elles sécrètent est si corrosive que si l’animal l’avale avec sa salive elle agit comme un poison des plus subtils et emporte le malade en moins de 12 heures. Sitôt qu’on s’aperçoit de ce mal redoutable, il faut saisir la langue de l’animal avec la main gauche, la tirer hors de la bouche le plus possible, couper avec le bistouri ou des ciseaux toutes les parties ulcérées, puis presser fortement les parties saines pour en faire sortir le sang qui pourrait être vicié, en ayant soin de tenir la bouche ouverte et la tête en contrebas pour que l’animal n’avale rien de ce qui sort de la plaie. On étuvera ensuite la langue avec de la teinture d’aloès, ou bien avec de l’eau-de-vie chargée d’ammoniaque et de camphre. Quant au traitement intérieur, ce sera l’affaire du vétérinaire qu’on se hâtera d’appeler. Il faut avoir soin de bien couvrir le malade, de l’étriller et de le bouchonner exactement.

Charbon musaraigne. Il commence par une petite tumeur qui a son siège aux glandes de l’aine, à la partie supérieure et interne de la cuisse, et qui dégénère en gangrène, si l’on n’y remédie promptement. Il ne suppure point. Il faut se hâter de faire des incisions profondes dans la tumeur ; on la lave ensuite avec de l’essence de térébenthine, 4 fois en 5 heures ; enfin, on y applique de la teinture d’aloès et un onguent vésicatoire. On joindra à ce traitement des lavements émollients et rafraîchissants, et l’animal sera mis à la diète, avec de l’eau légèrement vinaigrée pour boisson. Une saignée pratiquée le premier jour par le vétérinaire peut être très utile. — Les paysans attribuent cette maladie à la morsure de la petite souris des champs appelée musaraigne ; d’où le nom qu’elle porte.

Charbon symptomatique. Voy. Eau rousse.

Charbon des céréales (Agriculture)

Cette maladie, dite aussi Chabouille ou Nielle, attaque fréquemment le froment, l’avoine, l’orge et le millet ; elle se répand tout à la fois sur les grains, les balles, les épillets et anéantit quelquefois les deux tiers d’une récolte. Le charbon détruit surtout le grain à sa naissance : il occupe les glumelles sous la forme d’une poussière noire sans enveloppe spéciale, différant en cela de la Carie qui laisse au grain sa forme et son apparence extérieures. Néanmoins, il est moins funeste que la carie. Comme il se manifeste dès le printemps, il a terminé ses ravages avant la maturité de la moisson, et la poussière noire emportée par les vents ou lavée par les pluies ne se communique pas au reste du grain. C’est en vain qu’on essayerait de préserver les céréales du charbon par le chaulage, les labours multipliés ou d’abondantes fumures ; les spores disséminées dans le sol attaqueront la nouvelle récolte. Le seul moyen vraiment efficace est de substituer aux céréales pendant plusieurs années de suite d’autres plantes non graminées, comme la betterave, le colza, le navet, etc. Les spores périront faute de rencontrer les plantes qui leur conviennent. Voy. Carie.

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