Cession des biens

(Droit). Elle peut être faite par un débiteur à ses créanciers lorsqu’il se trouve hors d’état de payer ses dettes. Si les créanciers acceptent la cession, elle n’a d’effet que suivant les conditions stipulées entre eux et le débiteur ; elle peut être faite par acte sous seing privé. Un débiteur malheureux et de bonne foi peut, pour être exempt de la contrainte par corps, et pour se libérer jusqu’à concurrence de ce qu’il abandonne, obtenir des tribunaux la faculté de faire en justice la cession de tous ses biens à ses créanciers ; il peut la demander alors même que, par une convention quelconque, il s’en serait interdit le bénéfice ; les créanciers ne peuvent s’y opposer que dans les cas spécialement prévus par la loi. Si les biens abandonnés ne suffisent pas pour payer toutes les dettes, le débiteur est obligé d’abandonner ceux qui lui surviendraient ultérieurement jusqu’au parfait payement. Les créanciers ne deviennent pas propriétaires des biens abandonnés : la cession judiciaire leur donne seulement le droit de les faire vendre à leur profit, et d’en percevoir les revenus jusqu’à la vente. Si la vente produit plus qu’il n’est nécessaire pour payer, le surplus appartient au débiteur. Jusqu’à ce que les biens soient vendus, le débiteur peut les reprendre, à charge de payer tout ce qu’il doit en principal, intérêts et accessoires. — La cession de biens judiciaire ne peut être accordée aux étrangers, aux stellionataires, aux banqueroutiers frauduleux, aux condamnés pour vol ou escroquerie, aux comptables, tuteurs, administrateurs et dépositaires. Ceux qui peuvent la demander doivent, pour l’obtenir, déposer, au greffe du tribunal de leur domicile, leur bilan, leurs livres s’ils en ont, leurs titres actifs ; le débiteur qui a été admis à faire cession doit venir en personne, ses créanciers appelés, la réitérer à l’audience du tribunal de commerce, ou, à défaut, à la mairie, un jour de séance. En vertu du jugement, les créanciers peuvent faire vendre les biens meubles et immeubles du débiteur, en suivant les formes prescrites pour les héritiers sous bénéfice d’inventaire. — Quand la cession a été volontaire, la vente se fait d’après les conditions convenues entre les créanciers et le débiteur. Le contrat d’abandon ne lie que les créanciers qui y ont figuré ; mais ceux qui n’étaient pas présents peuvent y donner, plus tard, leur adhésion. Les créanciers peuvent régler entre eux la mode de gestion des biens, par un contrat d’union ou de direction, lequel peut être passé sous seing privé (C. Nap., art. 1265-70 : C. de proc. civ., art. 898-905).

La cession de biens pour être vendus par les créanciers est soumise à un droit fixe d’enregistrement, de 5 fr. ; et il est dû, en outre, un droit fixe de 3 fr., si l’union entre les créanciers se trouve dans le même acte que la cession. Si , en même temps qu’il abandonne ses biens, le débiteur remet aux créanciers une somme d’argent, il est dû un droit de libération de 50 c. par 100 fr. Si, par un contrat, le débiteur abandonne ses biens à ses créanciers pour qu’ils en disposent comme ils l’entendront, cet acte constitue une vente, et est soumis comme tel, au droit proportionnel perçu sur les ventes pures et simples, mobilières ou immobilières.

Formules. — 1° Cession volontaire.

Entre les soussignés : Christophe N… (qualité, demeure), d’une part ; (si c’est un fondé de pouvoir qui se présente pour le débiteur, il faut mentionner sa procuration) ; et les sieurs N… (noms, prénoms, qualités, demeures des créanciers), tous créanciers dudit sieur N… Il a été dit, convenu et arrêté ce qui suit : M. Christophe N… a exposé que (relater les circonstances qui l’ont constitué débiteur et celles qui l’empêchent de se libérer) ; dans cette situation, se voyant dans la nécessité de faire abandon à ses créanciers de tous ses biens, pour obtenir d’eux sa libération, il a fait dresser son bilan, d’après lequel son actif se monte à…, (mentionner s’il y a des créances douteuses) ; et son passif s’élève à…, lequel bilan est joint au présent acte, et signé de M. Christophe N… Les créanciers susnommés, ayant pris connaissance de ce bilan, ont, après délibération, accepté l’abandon offert par M. Christophe N…, et ont arrêté avec lui les conventions suivantes :

M. Christophe N… cède et abandonne à ses créanciers les biens meubles et immeubles à lui appartenant et qui consistent (désigner les biens, mentionner l’acceptation par les créanciers, et les arrangements particuliers passés entre eux et le débiteur). — Si l’abandon est insuffisant pour libérer entièrement le débiteur, on mettra : M. Christophe N… ne sera libéré à l’égard de chaque créancier que jusqu’à concurrence du montant de ce que celui-ci touchera dans la répartition ; en conséquence, chaque créancier conserve, pour le surplus qui lui sera dû, tous ses droits, actions, recours en garantie, privilèges et hypothèques contre M. Christophe N… (ajouter, s’il y a lieu : et contre ses codébiteurs, cautions et coobligés solidaires). — Si la libération est définitive, on dira : moyennant l’abandon ci-dessus, les susdits créanciers de M. Christophe N… le tiennent pour entièrement libéré, à leur égard, de toutes créances en principal, intérêts, frais et autres accessoires, et de toutes répétitions y relatives. Ils renoncent à toutes poursuites contre lui, et le déchargent entièrement de la contrainte par corps.

2° Union entre les créanciers pour l’administration et la vente des biens cédés. — (Ce contrat peut être fait, soit par acte séparé de la cession, et alors il doit la mentionner en s’y référant, soit dans le même acte, comme il suit). Les créanciers du sieur Christophe N…, après en avoir délibéré entre eux, et du consentement de leur débiteur, afin d’éviter des frais et pertes de temps, sont convenus des dispositions suivantes : ils déclarent conférer aux sieurs…, créanciers susnommés pouvoir pour, au nom et dans l’intérêt de tous collectivement, procéder au règlement et à la liquidation de toutes créances actives comprises dans l’abandon ; pour tous actes de surveillance et d’administration des biens abandonnés, pour opérer la vente desdits biens, pour la perception et le recouvrement immédiat des sommes résultant des créances, du prix des ventes, et le versement des rentrées et revenus à la Caisse des dépôts et consignations ; les autorisant à faire, à ces divers effets, toutes diligences, procéder à toutes opérations, faire tous actes judiciaires ou extrajudiciaires de demande ou défense, mainlevée ou consentement de radiations d’inscription ; à agir, enfin, jusqu’à ladite distribution des deniers, comme leurs représentants communs ; domicile étant élu pour tous en la demeure de… — Lesdits sieurs… déclarent n’accepter le mandat ci-dessus que sous la condition qu’ils ne seront garants d’aucun événement, qu’ils seront remboursés, par privilège et préférence, de tous leurs frais, faux-frais et déboursés ; qu’ils pourront donner leur démission individuellement, sans être obligés de demander le consentement ni la présence des autres créanciers.

Fait double à…, le… (Date et signatures).

(La partie qui n’a pas écrit met avant sa signature : approuvé l’écriture ci-dessus.)

3° Adhésion d’un créancier qui n’a pas signé l’acte d’abandon avec les autres.

Je soussigné, après avoir reçu communication et pris lecture de l’acte d’abandon en date du…, par lequel M. Christophe N… abandonne tous ses biens à ses créanciers, déclare adhérer purement et simplement au dit acte, et consentir à sa pleine exécution, comme si j’y avais concouru. J’élis domicile en ma demeure pour l’exécution du présent acte.

Fait à…, le… (Signature.)

[S’il y a eu, en même temps que l’abandon, ou même séparément, un contrat d’union entre les créanciers, l’adhérent devra mentionner les deux actes, et dire qu’ayant pris communication du contrat d’union intervenu à la suite de l’abandon, et de toutes les pièces relatives à ces deux actes, il déclare adhérer purement et simplement tant à l’acte d’abandon qu’au contrat d’union, etc.] — Voy. aussi Concordat par abandon.

Cession de créances. Voy. Transport.

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