Canaux

(Législation). — Canaux de dérivation. Ceux qui servent aux moulins ou usines ne peuvent être établis qu’avec la permission de l’autorité administrative, laquelle se demande au préfet. S’ils traversent des propriétés étrangères, les maîtres de celles-ci doivent être indemnisés des terrains qu’ils perdent. Ces canaux sont, ainsi que les eaux, la propriété exclusive de celui qui les a établis ; en l’absence de titres de propriété, il y a présomption en faveur du propriétaire de l’usine dont le canal est l’accessoire. De même la propriété du canal emporte celle des rives, francs-bords ou berges ; toutefois cette présomption cède devant la preuve du contraire, résultant de titres, ou même de la possession, p. ex. de la culture de ces berges, ou de plantations qu’on y aurait faites, ou de bois qu’on en a enlevé depuis plus de 30 ans. — Les riverains n’ont pas le droit de se servir des eaux de ces canaux, de pratiquer des saignées pour l’arrosement des terres ; seulement, si le propriétaire de l’usine n’en éprouvait aucun préjudice, il devrait laisser les riverains user des eaux du canal pour le lavage, le puisage et l’abreuvage. Le propriétaire du canal y a le droit de pêche. — Celui qui est troublé dans la possession du canal par le détournement d’une partie des eaux, peut agir au possessoire devant le juge de paix pour faire rétablir les choses dans leur ancien état ; l’auteur du trouble peut se défendre en prouvant, à défaut de titre, par des ouvrages apparents, que, depuis plus d’une année, il a dirigé les eaux du bief sur son héritage. S’il y a contestation sur le droit ou les titres de propriété du canal, ou sur l’existence d’une servitude, la contestation doit se porter devant le tribunal de première instance.

Le propriétaire du canal doit en jouir et l’entretenir de manière à ce qu’aucun dommage ne soit causé aux propriétés riveraines ; si le canal est dégradé, la réparation peut en être exigée, sans préjudice des dommages-intérêts pour les pertes qui auraient été occasionnées par l’infiltration des eaux ou autrement. Le propriétaire est tenu de faire le curage du canal qui lui appartient ; les riverains qui peuvent avoir à craindre ou qui subissent du dommage à raison du défaut de curage ont le droit de traduire le propriétaire devant le juge de paix, qui connaît, en général, des actions relatives au curage des canaux servant au mouvement des usines, lorsque les droits de propriété ou de servitude ne sont pas contestés. Si le propriétaire du canal l’est aussi des francs-bords, il peut et doit s’en servir pour le passage des ouvriers qui travaillent au curage, et le dépôt des matériaux qui en proviennent ; s’il n’a pas la propriété, il est néanmoins en droit de passer et de faire tout ce qui est nécessaire au curage. Les frais du curage sont au compte du propriétaire du canal, lequel supporte aussi l’indemnité qui pourrait être due à raison du dommage que l’opération aurait causé.

Le canal de fuite d’un moulin à eau, quand il a été creusé de main d’homme, est présumé faire partie du moulin ; il comporte les mêmes droits, et impose les mêmes obligations que le canal de dérivation proprement dit. Le maître de ce canal, s’il n’est pas propriétaire des bords, peut, quand il procède au curage, rejeter, à la distance fixée, soit par convention, soit par l’usage des lieux, les vases et les boues sur les propriétés riveraines.

Canaux de dessèchement. Voy. Dessèchement.

Canaux d’irrigation. Voy. Irrigations.

Canaux de navigation. Quand les propriétaires des terrains sur lesquels ces canaux doivent être établis, après la publication de la loi qui a ordonné ou autorisé les travaux, ne sont pas tombés d’accord avec l’administration ou avec les concessionnaires, il est procédé à la prise des terrains dans les formes et avec les garanties des lois de l’expropriation pour cause d’utilité publique ; ils sont tenus de souffrir l’expropriation même pour le chemin de halage, les contrefossés, et toutes les dépendances des canaux. Lorsqu’un canal emprunte des parties du lit d’un cours d’eau navigable, les riverains sont tenus de livrer pour le chemin de halage, le terrain qui doit leur être acheté ; il en est de même pour les portions de terrain bordant un canal établi sur des parties d’un cours d’eau non navigable : dans ce dernier cas, la perte de l’usage des eaux donne droit à une indemnité. L’emploi, par un canal, du lit sur lequel coulent des eaux non navigables, ne donne aux riverains aucun droit à une indemnité ; il n’en est dû que pour l’établissement du chemin de halage. On doit aussi indemniser les riverains d’un cours d’eau, incorporé dans un canal, de la perte du droit de pêche, du détournement des eaux pour l’alimentation du canal, du dommage causé par les infiltrations. — Quand l’État fait la concession d’un canal, il n’en aliène pas la propriété, mais seulement la jouissance ; il s’ensuit que l’on ne peut acquérir par prescription aucune partie d’un canal de navigation, qu’il ait été construit par l’État, ou par une compagnie, ou un particulier concessionnaire.

Les canaux de navigation sont régis par les règlements généraux de la voirie fluviale ; il est donc défendu d’y jeter ou d’y déposer aucun objet pouvant embarrasser ou atterrir le lit, de circuler sur le chemin de halage dans un intérêt autre que celui de la navigation, de faire aucune manœuvre qui puisse nuire à la sûreté et à la liberté de la navigation. Les règlements particuliers relatifs à la police de chaque canal, lesquels sont arrêtés par le préfet, sont obligatoires pour les particuliers, sous peine d’être traduits devant le tribunal de police. — Les usurpations sur les francs-bords des canaux navigables et des rigoles qui les alimentent, les dégradations commises aux talus, à tous les ouvrages d’art et aux dépendances du canal constituent des contraventions de grande voirie, justiciables du conseil de préfecture. S’il s’élève des questions d’interprétation de titres de propriété, de servitude, d’anciens usages des eaux, les tribunaux civils sont seuls compétents pour en juger.

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