Billard

(Jeux d’adresse). 1° Tout le monde sait que le meuble appelé billard consiste en une sorte de table d’environ 4 mètres de longueur, sur une largeur de moitié, et portée sur des pieds de forte dimension. Le dessus de cette table offre une surface parfaitement horizontale recouverte d’un drap vert qui y est exactement appliqué. Les rebords élevés qui règnent tout autour de la table s’appellent les bandes. Il y a six trous appelés blouses, et qui sont situés, quatre aux quatre coins de la table, et les deux autres au milieu des deux grandes bandes. Trois mouches ou petites marques rondes sont placées sur le billard : l’une entre les deux blouses du milieu, et les deux autres à une certaine distance des petites bandes du billard. À la hauteur de la mouche d’en bas, une ligne, nommée corde, est tracée dans toute la largeur du billard. C’est de cette ligne, ou même de tout l’espace compris entre la mouche et la bande du bas, que les joueurs sont obligés de jouer, lorsqu’ils débutent, et toutes les fois qu’ils sont renvoyés au but. Dans certaines parties, le but est l’espace compris dans le demi-cercle qui entoure la mouche d’en bas. Les instruments dont on se sert pour jouer sont des billes d’ivoire et des espèces de bâtons appelés queues, avec lesquels on frappe ou on pousse les billes. Ces queues sont en bois de frêne, d’amandier ou des îles ; le petit bout est garni d’une rondelle de cuir dite procédé, et le gros bout d’une plaque d’ivoire. — Les parties qui se jouent le plus habituellement au jeu de billard sont : la partie blanche ou le même, le doublé, le carambolage, la partie russe et la poule. Il suffira d’indiquer les principales règles de chacune de ces parties.

La partie blanche ou le même se joue ordinairement à deux, avec deux billes blanches et une bille rouge. La bille rouge ayant été placée sur la mouche du haut, les deux joueurs prennent chacun une des deux billes blanches, et commencent par donner leur acquit. Donner l’acquit, c’est pousser la bille d’un seul coup de queue vers le haut du billard en jouant du but. La bille, après avoir touché la petite bande du haut, redescend vers la partie inférieure, et le joueur dont la bille s’arrête le plus près de la petite bande d’en bas a le droit de commander, c.-à-d. de choisir s’il veut jouer le premier ou faire jouer d’abord son adversaire. Pour que l’acquit soit bon, il faut que la bille, après avoir touché la petite bande du haut, dépasse en revenant les blouses du milieu. Si, en donnant l’acquit, le joueur envoie sa bille dans une blouse, il ne perd rien, mais sa bille est mise en pénitence. Il en est de même si après avoir touché la bille pour donner l’acquit, il la touche de nouveau pendant qu’elle roule, ou lorsque déjà elle s’est arrêtée. Après le premier coup qui suit le début et qui est nécessairement joué sur la rouge, on joue, à volonté, sur la rouge ou sur la blanche, selon les chances de gain que présente chaque coup. On appelle faite au même toute bille, blanche ou rouge, qui étant choquée par l’autre bille blanche, est poussée directement dans une des blouses, et faite au doublé toute bille qui étant frappée par l’autre bille blanche ne tombe dans la blouse qu’après avoir touché l’une des bandes. Le joueur qui fait la bille blanche compte 2 points de gain ; s’il se perd, c.-à-d. s’il envoie sa propre bille dans la blouse, c’est l’adversaire qui compte 2 points. La bille rouge faite vaut 3 points. Le coup de 4 est celui où il y a carambolage et bille blanche faite en même temps ; un point de plus est compté si c’est la bille rouge ; enfin le coup de 7 s’exécute par un carambolage et les deux billes, la rouge et la blanche, faites du même coup. On appelle carambolage l’action de toucher en même temps ou successivement, mais toujours du même coup, les deux billes avec celle dont on joue. Le manque de touche est compté pour 1 point de perte. Le même joueur continue de jouer tant qu’il réussit à faire des points de suite ou coup sur coup. Lorsqu’un joueur a ramené sa bille et la rouge dans le quartier d’en bas, l’adversaire ne peut toucher l’une ou l’autre qu’en frappant d’abord avec sa bille la petite bande d’en haut ; c’est ce qu’on appelle le coup de bas. Quand un joueur a sa bille placée trop loin de la bande, pour qu’il puisse la pousser commodément avec le petit bout de la queue, il a toujours la faculté de se servir du gros bout. Lorsque, la bille rouge étant faite, une bille blanche en occupe la place sur la mouche, la rouge se met entre les deux blouses du milieu ; et si la place de la bille rouge devient vacante avant que cette dernière ait été dérangée, on la replace sur la mouche d’en haut. La partie se joue en 20 ou 24 points. — La partie blanche se joue aussi à quatre, en s’associant deux contre deux, et chacun joue, soit alternativement, soit après bille faite. Elle peut encore se jouer à trois, chacun pour soi : le premier gagnant est celui qui est plus tôt arrivé à 16 ou à 20 points : les autres joueurs continuent la partie jusqu’à ce que l’un d’eux ait fait 20 ou 24 points.

Le doublé peut se jouer avec ou sans la bille rouge : dans tous les cas les billes faites au même ne comptent pas. Pour qu’une bille qui est envoyée dans une des blouses puisse être comptée au profit du joueur, il faut qu’après avoir reçu le choc de l’autre bille blanche elle reçoive encore le contre coup de la bande ou d’une bille qu’elle rencontre en son chemin. Si la rouge est admise dans le jeu, les carambolages sont comptés comme dans la partie blanche. Le doublé se joue ordinairement en 20 points.

Le carambolage. Dans cette partie, qui se joue avec les deux billes blanches et la rouge, on ne compte, comme gain, que les carambolages. Les manques de touche et les pertes ne sont ni au détriment ni au profit de personne. Le même joueur continue de jouer tant qu’il réussit à caramboler coup sur coup. Chaque joueur doit calculer ses coups de manière à se ménager, autant que possible, un nouveau carambolage après celui qu’il vient de faire, mais de manière aussi à ne pas laisser, dans le cas où il ne réussirait pas, de trop belles chances à son adversaire pour le coup suivant. Le carambolage se joue ordinairement en 20 points, comme le doublé. On fabrique aujourd’hui tout exprès pour ce jeu des tables de billard qui n’ont pas de blouses.

La partie russe se joue avec 5 billes, 2 blanches pour les joueurs, 1 rouge, 1 bleue et 1 jaune. La bille rouge se place sur la mouche du haut, la jaune au milieu du billard et la bleue sur la mouche du bas. Le joueur qui a la main, c.-à-d. qui joue le premier, se place autour de la bille bleue, pour donner l’acquit, et il pousse sa bille blanche de manière à la cacher derrière la bille rouge, et cela sans toucher aucune des billes placées sous peine de recommencer et même de perdre un point. L’adversaire joue son premier coup sur l’acquit, et ensuite on peut jouer sur toutes les billes. La bille blanche faite vaut 2 points et peut être envoyée dans toutes les blouses ; la rouge et la bleue ne peuvent être faites que dans les blouses des 4 coins et valent 4 points chacune ; la jaune seule vaut 6 points, mais elle ne compte que lorsqu’elle est faite dans les blouses du milieu. Le joueur qui fait entrer les billes rouge, bleue ou jaune dans les blouses qui ne leur sont pas spécialement destinées perd le nombre de points indiqué par chacune de ces billes. Le carambolage est compté pour 2 points, sur quelques billes qu’il soit fait. La partie russe se joue ordinairement en 36 points.

La poule. Cette partie peut réunir un assez grand nombre de joueurs et offre un agréable passe-temps pour la soirée, surtout à la campagne. On met dans un panier fait en forme de grande bouteille de petites billes de bois numérotées, en nombre égal à celui des joueurs, et après les avoir agitées pour les mêler, on les distribue à la ronde une par une : celui qui a le numéro 1 joue le premier et ainsi de suite. On n’a besoin pour cette partie que des deux billes blanches. Celui qui donne l’acquit pousse sa bille vers la petite bande du haut et tâche de la rapprocher le plus possible de cette bande : du reste, pour que l’acquit soit bon, il suffit que la bille dépasse les blouses du milieu. Le joueur peut, tant que sa bille roule, préférer la pénitence à son acquit ; mais il ne peut plus exercer ce droit, dès qu’il a laissé sa bille s’arrêter. Lorsque le numéro 1 a donné son acquit, le numéro 2 joue sur l’acquit avec l’autre bille, le numéro 3 avec la bille de l’acquit, le numéro 4 avec la bille du numéro 2, et ainsi de suite jusqu’à ce qu’il y ait bille faite. Après chaque bille faite par l’un des joueurs, c’est le numéro suivant qui donne l’acquit. Tout joueur dont la bille est faite ou qui, en jouant, se perd ou ne touche pas la bille, est marqué d’un point. Tout joueur qui a pris un certain nombre de points déterminé d’avance (c’est ordinairement 3), est par ce fait hors du jeu ; il est tué. Quand la plupart des joueurs ont ainsi succombé dans la lutte, et qu’il n’en reste plus que 2, c’est celui qui fait bille qui doit donner l’acquit. Le dernier survivant gagne la poule. Quelquefois on joue simplement pour l’honneur ; plus souvent on intéresse le jeu par une légère mise d’argent que chacun a d’abord déposée, et la réunion de ces mises forme la poule qui appartient au vainqueur.

2° La pratique seule peut donner une certaine habileté au jeu de billard ; seule elle peut faire acquérir cette justesse de coup d’œil et cette sûreté de la main qui sont les meilleures chances de succès, et apprendre ces procédés variés au moyen desquels on obtient des effets plus ou moins heureux. Ainsi, p. ex., pour faire revenir sur elle-même la bille qu’on joue après qu’elle aura touché une autre bille, il faut la frapper d’un coup sec dans le bas, en retirant à soi vivement la queue ; on réussira plus sûrement si l’on a préalablement frotté le procédé avec un morceau de craie. Si l’on veut, au contraire, que la bille qu’on joue suive une autre bille dans sa marche, il faut la frapper dans le haut, vers la tête, et l’accompagner, pour ainsi dire, avec la queue qui cependant ne doit plus la toucher. Ces finesses et beaucoup d’autres ne peuvent s’apprendre que par l’usage. Mais ce qu’il importe de constater, c’est que le jeu de billard est un excellent exercice non seulement pour les jeunes gens et les jeunes filles, mais aussi à tout âge ; après la promenade et les jeux en plein air, c’est une des récréations les plus agréables qu’un père de famille puisse procurer à ses enfants. Aussi pour les personnes qui jouissent d’une certaine aisance, un billard est un meuble presque indispensable à la campagne. — Le prix d’un billard varie, suivant la perfection ou la richesse du travail, depuis 7 à 800 fr. jusqu’à 2 500 à 3 000 fr. Les personnes qui achètent un billard feront bien de ne pas recevoir de table à drap cloué ; aujourd’hui on a imaginé des systèmes de tension qui appliquent le drap sur la table sans le déchirer avec des clous, et qui permettent de l’enlever et de le remplacer à volonté. Une table parfaitement horizontale, des bandes qui rendent bien, et des pieds d’une immobilité absolue constituent un bon billard. Les billards dont la table est composée de plaques d’ardoise, ont une horizontalité beaucoup plus parfaite que ceux dont la table est formée de pièces de bois, quelque bien ajustées que soient celles-ci. Quant à l’élasticité des bandes, elle résulte, soit d’une armature de lisières, soit de ressorts, soit enfin de lames en bois découpées. Les queues, suivant qu’elles sont plus ou moins ornées, valent de 10 à 12 fr. la douzaine jusqu’à 30 et 40 fr. la pièce. Les meilleures, sinon les plus riches, sont celles en bois de frêne. Dans l’achat d’une queue, il faut observer qu’elle soit taillée sur le droit fil du bois. Les billes sont en ivoire ; elles doivent être parfaitement rondes et ne pas avoir de fèves, c.-à-d. de petites taches d’un blanc mat. Voy. Salle de billard.

3° Bien que le jeu de billard soit un jeu dont l’adresse est la condition principale, on ne le comprend généralement pas parmi les jeux d’adresse pour lesquels la partie gagnante a une action en justice pour se faire payer ; les dettes de jeu contractées au billard sont donc considérées comme nulles par les tribunaux. — Lorsqu’un règlement de police soumet l’ouverture et la tenue d’un billard public à la nécessité d’une autorisation préalable, ce règlement est obligatoire ; celui qui l’enfreindrait serait passible d’une amende de 1 à 5 fr. Voy. Cafés. — Voy. aussi Supplément.

Billard anglais

C’est un petit billard à l’usage des enfants. Il consiste en une sorte de table inclinée, dont la surface est garnie, à partir d’une certaine distance des bandes, de gros fils de fer en forme de fer à cheval et formant une série de petits ponts disséminés çà et là, sous lesquels la bille doit passer, tout en heurtant, à droite ou à gauche, les tiges qui représentent les côtés des arches. Le joueur se place devant la petite bande d’en bas, et il pousse la bille avec une queue dans l’espace qui se trouve entre les ponts de fil de fer et la grande bande de droite. Il faut bien calculer la force d’impulsion qu’on imprime à la bille. Si le coup est trop faible, la bille ne fait en montant le long du billard qu’une partie du chemin qu’elle devrait parcourir, et descendant par son propre poids, elle revient par le même chemin et sans résultat à la place d’où elle est partie. Si le coup est trop fort, la bille remontant toute la longueur du billard à droite, traverse l’espace qui se trouve entre les ponts et la petite bande d’en haut, et redescend par le côté gauche, également sans résultat. Il faut donc que le coup soit donné de telle sorte que la bille, ayant reçu l’impulsion nécessaire pour monter tout le long du billard à droite, arrive au milieu de la petite bande du haut, et que, descendant aussitôt, elle passe sous les petits ponts, allant tantôt à celui-ci, tantôt à celui-là ; repoussée d’un côté, repoussée de l’autre, mais poursuivant toujours sa route, elle parvient enfin au dernier rang de ces ponts qui portent des numéros plus ou moins élevés, et le joueur tient note du numéro du pont sous lequel sa bille a passé. Le joueur suivant fait de même, chacun jouant à son tour un seul coup, et celui des joueurs qui atteint le plus tôt le nombre de points dont on est convenu gagne la partie.

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