Betterave

(Agriculture). Les variétés les plus cultivées pour la nourriture des bestiaux sont : la Disette ou Betterave champêtre, la plus rustique de toutes et la moins exigeante pour la qualité du sol, parce qu’elle pousse autant en dessus qu’en dessous de sa surface ; et la Betterave blanche de Silésie, ou Betterave à sucre, qui demande une terre plus profonde et des fumiers consommés. Cette dernière se conserve plus longtemps que la disette ; aussi dans les exploitations bien conduites, a-t-on soin d’en avoir toujours quelques hectares ensemencés pour fournir à la consommation du bétail quand la provision des disettes est épuisée.

Culture

1° Le sol qui convient le mieux à la betterave est une terre franche et profonde ; elle réussit néanmoins partout où viennent le blé, l’orge, le seigle, la pomme de terre, la féverolle, le trèfle, la luzerne. Sa place, dans l’assolement triennal, est sur la jachère, et, dans l’assolement alterne, entre deux céréales. Celles qu’on cultive pour l’extraction du sucre succèdent à des pommes de terre fumées ou bien on demande à la terre deux récoltes de betteraves à la suite l’une de l’autre, sur une fumure. On donne à la terre destinée à porter des betteraves trois labours : avant l’hiver, on fait un labour à grosses raies ; au printemps, on herse, puis on transporte le fumier qu’on enterre par un moyen labour ; vers la fin de mars ou au commencement d’avril, on donne le troisième labour à raies étroites et profondes : c’est le labour de semence après lequel il faut se garder de herser. — C’est du 10 au 20 avril que se font les meilleures semences de betteraves. On sème la betterave à la volée, au semoir et à la main. Le premier procédé est vicieux ; pour le dernier, qui est le plus usité, Voy. Semailles. — Les soins d’entretien de la betterave consistent en deux et plus souvent en trois binages. La betterave ne se butte pas. Dès que les betteraves ont toutes sorti leurs deux premières feuilles, en compagnie d’une foule de mauvaises herbes, on donne le premier binage. Dans une culture un peu importante, les ouvriers en terminant celui-ci dont la durée est de 15 jours ou 3 semaines, passent immédiatement au second en reprenant la besogne où ils l’ont commencée. C’est de la célérité que l’on apporte à donner ce second binage que dépend le succès de la récolte. S ’il n’est pas donné avant la fin de juin, les jeunes betteraves sont perdues dans une forêt d’herbes parasites. Les sécheresses qui viennent à cette époque arrêtent quelquefois la crue des betteraves, mais elles arrêtent également celle des herbes adventices déjà bien diminuées par les deux premiers binages, et lorsqu’on a donné le troisième, après la rentrée des avoines, au commencement de septembre, on peut être assuré que toutes les alternatives d’humidité et de chaleur qui suivront tourneront exclusivement au profit de la végétation des betteraves.

On arrache les betteraves vers la fin d’octobre, quand leurs feuilles se couvrent de taches rouges et s’abaissent sur le sol : plus tard elles pourraient souffrir des premières gelées. L’arrachage se fait au moyen d’une greffoir de fer, par des hommes. Les femmes et les enfants suivent, finissent d’arracher à la main, secouent la plante, pour en séparer la terre, et en détachent le collet. Soixante ouvriers, hommes, femmes et enfants, peuvent arracher, décolleter et mettre en tas les racines d’un hectare et demi par jour.

On peut sans crainte effeuiller les disettes en automne, lorsque la nourriture verte commence à manquer dans les étables. Avec la précaution de ne cueillir que les feuilles qui s’inclinent vers le sol et de laisser celles de la couronne intactes, on n’arrête point le développement de la racine ; mais il ne faut pas faire subir cette mutilation aux autres variétés de betteraves ; elle nuirait à leur développement. — Les betteraves cultivées pour la nourriture des bestiaux donnent en moyenne, par hectare de 40 à 50,000 kilogr., et celles qui sont cultivées pour les sucreries, de 25 à 30,000 kilogr. Les premières se vendent de 10 à 12 fr. les 100 k. et les secondes de 16 à 20 fr. rendues aux fabriques. Les tourteaux de betteraves qui ont été soumis à l’action de la presse sont très nutritifs : on les achète de 8 à 10 fr. les 1,000 kilos.

Pour s’assurer de la bonne qualité des semences, on plonge les racines porte-graines dans de l’eau salée à 4° (c.-à-d. 40 gr. de sel par litre d’eau), et on ne confie à la terre que celles qui vont au fond de l’eau. — On peut aussi faire tremper les graines dans l’eau pendant 48 h., rejeter celles qui surnagent et ne planter que celles qui vont au fond.

2° Dans les jardins, la culture de la Betterave se borne à une seule espèce, la Betterave rouge, dont on possède plusieurs bonnes variétés. Les plus communément cultivées sont : la Grande et la Petite de Castelnaudary, la Betterave rouge ronde précoce, et la Betterave rouge de Bassam. On rencontre aussi, mais rarement dans les jardins potagers, la Betterave jaune ordinaire et la Betterave jaune de Castelnaudary. Elles se sèment en place vers la fin d’avril, et réclament quelques binages pendant la belle saison. Les racines sont arrachées en octobre.

Conservation

Quand on veut conserver une récolte de betteraves, soit pour les employer à la nourriture des vaches laitières, soit pour tout autre usage, on la met dans une cave bien sèche ou dans un local à l’abri de la gelée, absolument comme des carottes ou des pommes de terre. — Une autre méthode consiste à mettre les betteraves dans des silos ou fosses creusées plus ou moins profondément dans le sol, et à les couvrir de plusieurs centimètres de terre sèche et d’un toit épais de paille de froment ou de seigle. Tous les deux ou trois ans on change l’emplacement de ces fosses, parce que celles qui ont servi s’imprègnent de ferments nuisibles à la conservation (Voy. Silos). Les betteraves ne doivent être rentrées et mises en terre que lorsqu’elles sont parfaitement mûres et bien ressuyées. Il est très essentiel de ne pas garnir de paille le fond de la fosse ainsi que le dessus du tas de betteraves, avant d’y jeter de la terre ; car la paille pourrit et entraîne inévitablement l’altération des racines qui la touchent ; et par suite, l’altération se transmet aux autres betteraves.

Cuisine

La betterave rouge et la betterave jaune sont toutes deux bonnes pour la cuisine : mais on emploie plus généralement la rouge. Il n’y a pas de signes bien marqués qui puissent faire reconnaître sûrement la qualité des betteraves : toutefois il faut les choisir de moyenne grosseur, bien faite, et d’une peau lisse. Pour les faire cuire, on les lave d’abord dans de l’eau fraîche, et, après les avoir essuyées avec une serviette imbibée d’eau-de-vie commune, on les met dans le four avant d’y enfourner le pain et on les y laisse encore après que le pain en a été retiré : il leur faut 6 ou 7 heures de cuisson bien soutenue ; la peau doit être très ridée et pour ainsi dire carbonisée. — On peut aussi les faire cuire en les laissant bouillir dans l’eau pendant 3 ou 4 heures, puis en les mettant au four et en les en retirant en même temps que le pain.

Betteraves en hors-d’œuvre. On les choisit bien rouges, bien tendres et bien saines, et, après les avoir nettoyées avec soin, on les coupe en tranches d’égale grosseur et on les arrose dans le ravier d’un peu d’huile d’olives.

Betteraves à la crème. Les betteraves ayant été cuites comme il a été dit ci-dessus, il faut les peler, les émincer en filets ou en tranches fines, et les faire cuire tout doucement dans une béchamel (Voy. ce mot). À défaut de béchamel, on les saute dans du beurre fin, en ajoutant du sel et une cuillerée de farine ; on mouille avec du lait, sans hâter la cuisson et de manière que la sauce soit douce et bien liée.

Betteraves en salade. Une fois qu’elles ont été cuites convenablement, on les coupe en tranches qu’on assaisonne comme toute autre salade, en y ajoutant quelques fines herbes ainsi qu’un oignon cuit à l’eau et taillé en anneaux.

Betteraves frites. On passe au beurre un oignon et une gousse d’ail finement hachés ; on y joint les betteraves cuites et coupées en tranches, et on les saute quelques moments. On les singe d’un peu de farine, on y ajoute une cuillerée de vinaigre, du sel, du poivre, un peu de persil haché, et, on ne les laisse bouillir que dix minutes avant de les servir.

Sirop de betteraves. La fabrication de ce sirop peut être pour le cultivateur la source de produits importants. Il s’en fait une grande consommation en Angleterre et en Belgique où les ouvriers le mangent étendu sur du pain, en guise de beurre ou de mélasse, et il s’exporte jusqu’en Russie. — Une cuve, une râpe à betteraves ou un coupe-racines, une presse, une écumoire et une chaudière pour faire évaporer le jus, quelques tonnes enfin pour contenir le sirop, tels sont les seuls appareils nécessaires pour cette fabrication. On lave d’abord les betteraves et on les fait cuire ; après les avoir retirées de la chaudière, on les râpe ou on les coupe, puis on en exprime tout le jus au moyen de la presse. Ce jus recueilli est ensuite évaporé soit au bain-marie, soit à feu nu jusqu’à ce qu’il ait la consistance voulue ; sept ou huit heures d’ébullition suffisent pour obtenir ce résultat. Ce sirop peut se vendre 50 centimes le kilogramme. Or 1 000 kilos de betteraves revenant à 20 fr. en moyenne peuvent produire 150 kilogr. de sirop valant 75 fr. et procurer par conséquent un très beau bénéfice, tout en tenant compte des frais de fabrication.

Sucre de betteraves. Voy. Sucre.

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