Badinage

(Chasse). Les oiseaux d’eau ont pour le renard une antipathie prononcée. Dès qu’ils en aperçoivent un, ils s’avancent pour le braver jusqu’au bord de l’eau. On a profité de cette habitude du gibier d’eau pour faire aux canards sauvages une chasse assez productive que l’on appelle le badinage. Pour qu’elle ait un plein succès, il faut préparer les lieux quelque temps d’avance. Dès le mois d’octobre on fait faucher tous les roseaux qui entourent un étang, tous les buissons, toutes les herbes, de manière que les bords en soient entièrement dégarnis. À quelque distance de l’eau, on élève des haies sèches garnies de leur feuillage et assez grandes pour que trois chasseurs puissent se tenir derrière. On en construit plusieurs afin de pouvoir faire un choix, suivant la direction du vent, et on leur donne autant que possible, l’apparence d’un buisson naturel. Lorsque, en novembre, les canards sont arrivés, et qu’on veut leur faire la chasse, on transporte, dès la veille, les canardières auprès de l’abri qui se trouve au-dessous du vent et les chasseurs s’y rendent eux-mêmes une heure avant que le jour soit levé. Alors, si l’on a pu se procurer un renard bien dressé, on le lâche entre le paravent et le bord de la pièce d’eau. Si l’on n’a pas de renard à sa disposition, ce qui est le cas le plus ordinaire, on le remplace par un de ces chiens au museau pointu et de couleur fauve, qu’on appelle des loulous. Certains chasseurs se servent même de loulous blancs dont ils colorent le poil avec de l’ocre jaune ou de la terre de Sienne ; d’autres se contentent de revêtir leur chien de chasse d’une robe faite en peau de renard. Quoi qu’il en soit, lorsque les canards sont au milieu de la pièce d’eau, on donne quelques coups d’appeau qui leur font lever la tête ; dès qu’ils aperçoivent le renard vrai ou faux, ils s’approchent en bandes compactes pour le braver, puis lorsqu’ils sont très-près du rivage, ils se retournent : c’est le moment que le chasseur doit saisir pour faire feu, parce que les plumes étant prises par-derrière n’offrent pas de résistance au plomb. Il ne faut pas sortir immédiatement de sa cachette, afin de ne pas effrayer les blessés. Si l’on a eu soin de prendre le dessous du vent, les corps de ceux qui ont été tués, seront poussés naturellement vers le rivage, et les blessés, qui se hâtent toujours de gagner la terre viendront aborder près du paravent où l’on pourra facilement les achever à coups de fusil. Le soir et le matin sont les moments les plus favorables pour cette chasse. On peut s’y livrer jusqu’aux gelées et la renouveler au printemps, au moment de la remonte, lorsque les canards repassent pour se rendre dans le nord.

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