Asphyxie

(Hygiène). Deux causes principales produisent l’asphyxie ; ce sont : 1° les empêchements matériels à la respiration, submersion, strangulation, etc. ; 2° l’introduction dans le poumon soit d’un air vicié pas son mélange avec des gaz non respirables, soit d’un gaz quelconque autre que l’air atmosphérique. — L’asphyxie par submersion ou strangulation est presque toujours le résultat d’un suicide ou d’un crime, et par conséquent ne peut guère être prévenue. Au contraire, celle qui est produite par les gaz et surtout par l’acide carbonique peut être involontaire et purement accidentelle. Souvent, dans une chambre peu spacieuse, un fourneau contenant du charbon allumé pour faire cuire des aliments ou pour faire chauffer des fers à repasser, suffit pour asphyxier les imprudents qui n’ont pas prévu le danger. On ne peut trop combattre le préjugé qui fait, en pareil cas, considérer la braise comme inoffensive ; la combustion de la braise produit presque autant de gaz délétère que celle du charbon ; elle donne seulement un peu moins d’odeur (Voy. Braise). Les accidents de ce genre n’auraient jamais lieu si l’on s’imposait la loi de n’allumer jamais du charbon dans un fourneau, sans le placer à l’intérieur d’une cheminée dont l’aspiration entraîne au dehors le gaz acide carbonique. D’autres asphyxies accidentelles sont dues à l’accumulation de ce même gaz dans les pressoirs où se trouvent des cuves de vin ou de cidre en fermentation, et aussi dans les caves ou les celliers où l’on n’a pas pénétré depuis longtemps. Il suffit, pour faire cesser tout danger, d’établir, avant d’y rentrer, un courant d’air suffisant pour en renouveler l’atmosphère en quelques instants. — L’asphyxie par l’acide carbonique n’est pas toujours accidentelle ; même dans ce cas, les secours donnés à temps aux infortunés qui tentent de se donner la mort réussissent souvent à les rappeler à la vie. Il en est de même pour les noyés, les pendus, etc., que l’asphyxie soit accidentelle ou volontaire. Nous résumerons ici les excellents conseils fournis à cet égard par le Conseil d’hygiène et de salubrité publique.

Avant tout, il est important de rappeler que contrairement au préjugé populaire, il est non-seulement permis, mais urgent, d’administrer des secours immédiats, et sur le lieu même autant que possible, à tout asphyxié, sans attendre l’arrivée de l’autorité. Agir autrement, c’est encourir la responsabilité d’un résultat funeste, qu’on aurait pu facilement conjurer.

1° Asphyxie par submersion (Noyés). — On se gardera bien de secouer fortement ou de pendre par les pieds le noyé, sous prétexte de lui faire rendre l’eau qu’il pourrait avoir avalée. On le fera transporter sur un brancard dans la maison la plus prochaine, la tête relevée et à l’air, le corps couché sur le flanc droit. Là, on le déshabille le plus promptement possible et on le couche dans un lit modérément chaud ; on incline alors légèrement la tête en avant en la soutenant par le front, on écarte les mâchoires et l’on provoque la sortie de l’eau en promenant les doigts ou une plume dans la bouche ; en même temps, on exerce sur la poitrine et sur le ventre des pressions douces, lentes et alternatives, imitant celles de la respiration ; on passe sous le nez de l’alcali volatil, de l’eau de Cologne, du vinaigre ou des allumettes soufrées. Aussitôt que la respiration commence à se rétablir, on s’occupe de réchauffer lentement le corps : on applique de la laine chaude sur le ventre, on met des briques ou des bouteilles d’eau chaude à la plante des pieds, au creux des aisselles, aux aines ; on promène sur tout le corps un fer à repasser modérément chauffé, ou une bassinoire. On fait des frictions générales, et surtout vers la région du cœur, avec une brosse sèche ou avec la main, et mieux avec de la flanelle chaude imbibée d’eau-de-vie camphrée. — Le noyé, revenu à lui, prendra toutes les cinq minutes une cuillerée d’eau-de-vie ou d’eau de Cologne. S’il a envie de vomir, on lui administre deux ou trois grains d’émétique dans deux verres d’eau ; s’il survient des selles, on lui donne quelques cuillerées de vin chaud. Si le noyé reste sans connaissance, le visage rouge, violet ou noir, les membres flexibles et chauds, on pratiquera une saignée au pied, ou à la veine jugulaire. On s’abstiendra de la saignée, si le corps reste froid et roide. Comme dernier moyen, on fera brûler sur le creux de l’estomac, sur les cuisses et sur les bras, de petits morceaux d’amadou, de liège ou de papier. Tous ces soins doivent être continués pendant plusieurs heures de suite, sans se décourager : on a vu des noyés rappelés à la vie après 6 heures et plus d’efforts constants. — Il est inutile d’ajouter qu’il faut avoir recours au médecin le plus tôt qu’on pourra le faire : mais, en attendant sa venue, toute personne intelligente peut s’acquitter aisément des prescriptions qui viennent d’être indiquées.

2° Asphyxie par strangulation, ou suffocation (Pendus). — La première opération consiste à couper le lien qui entoure le cou et à descendre le corps en le soutenant de manière qu’il n’éprouve aucune secousse ; ensuite on enlève cravate, jarretières, corset, jupons, ceinture, en un mot toutes les parties du vêtement qui peuvent gêner la circulation ; après quoi on étend le malade sur un lit, un matelas, une table, de la paille, de manière qu’il ait la tête un peu élevée, et on le réchauffe par tous les moyens indiqués ci-dessus en attendant un homme de l’art qui puisse le saigner ou lui administrer les secours nécessaires. Si la strangulation a eu lieu depuis peu de minutes, il suffit quelquefois pour rappeler le malade à la vie de lui jeter de l’eau froide au visage, ou d’appliquer sur le front et les tempes des compresses d’eau froide, pendant qu’on frictionne les extrémités inférieures. Les sinapismes aux extrémités, les lavements au tabac ou au vinaigre sont très utiles. Si la face est rouge ou violette, et les veines du cou gonflées, et que le médecin tarde à venir, on pourra appliquer, derrière les oreilles et à chaque tempe, 5 ou 6 sangsues.

3° Asphyxie par des gaz non respirables. — Quand l’asphyxie a été produite par la vapeur du charbon, par une fuite de gaz d’éclairage, par les émanations des fosses d’aisance (mite ou plomb), des puisards, des égouts, des cuves à vin, à cidre ou à bière, etc., il faut retirer le plus promptement possible l’asphyxie du lieu où il se trouve et l’exposer au grand air ; après l’avoir déshabillé et placé sur une chaise en le maintenant dans une position verticale, on lui fera des affusions abondantes d’eau froide sur tout le corps et surtout à la face ; si l’on a de l’eau chlorurée à sa disposition, il faut l’arroser largement avec cette eau. De temps en temps, on s’arrêtera pour rappeler la respiration et provoquer le vomissement par les moyens précédemment indiqués. Dès que le malade pourra avaler, on lui fera boire de l’eau vinaigrée, on le placera ensuite dans un lit bassiné et en attendant l’arrivée du médecin, on pourra lui administrer un lavement dans lequel on aura mis deux cuillerées à bouche de vinaigre ou gros comme une noix de savon. C’est au médecin seul qu’il appartient de juger s’il y a lieu de donner un vomitif ; c’est aussi à lui de choisir les moyens de traitement à employer après que l’asphyxié a été rappelé à la vie.

4° Asphyxie par le froid. — Dans ce cas, il est de la plus haute importance de ne rétablir la chaleur que lentement et par degrés : on se gardera donc d’approcher l’asphyxié d’un feu ardent ou de le maintenir dans un lieu chaud ; on se gardera surtout de le mettre dans du fumier, comme on le fait souvent dans les campagnes. On portera l’asphyxié dans une chambre sans feu, on le déshabillera, on lui couvrira tout le corps de compresses d’eau froide et même glacée, on le frictionnera avec de la neige ou avec des linges trempés dans l’eau froide ; dès qu’il manifestera quelques signes de vie et commencera à se réchauffer, on le mettra dans un lit non bassiné : ensuite on lui fera boire un demi-verre d’eau froide ou bien une tasse d’infusion à peine tiède de camomille ou de thé, en ajoutant à l’eau ainsi qu’à l’infusion quelques gouttes d’eau de mélisse, d’eau de Cologne ou d’eau-de-vie. S’il y a assoupissement et stupeur, on lui fera boire de l’eau vinaigrée et on y joindra des lavements au sel ou au savon. — La vie peut revenir après 12 ou 15 heures de mort apparente.

5° Asphyxie par la chaleur. — Si l’asphyxie provient du séjour dans un lieu trop chaud où se trouvent réunies un trop grand nombre de personnes, il faut porter promptement le malade dans un lieu frais et aéré, et se hâter de le saigner ; s’il n’y a personne qui puisse pratiquer une saignée, il faut appliquer sur-le-champ 8 ou 10 sangsues derrière les oreilles et 15 ou 20 à l’anus. On y joindra un bain de pied médiocrement chaud, dans lequel on mettra de la cendre ou du sel. Dès que le malade pourra avaler, on lui fera boire de l’eau fraîche acidulée de vinaigre ou de jus de citron et on lui donnera des lavements d’eau vinaigrée. — Si l’asphyxie a été déterminée par l’action du soleil, ce qui arrive souvent aux moissonneurs et aux militaires, il faut joindre à la saignée des applications d’eau froide sur la tête.

6° Asphyxie par la foudre. — Il faut porter immédiatement l’asphyxie au grand air, le déshabiller, recourir à la fois aux affusions d’eau froide sur le corps, aux frictions des extrémités inférieures, et chercher à rétablir la respiration par des compressions intermittentes de la poitrine et du bas-ventre, comme il a été dit pour les noyés (Voy. ci-dessus).

Pour l’organisation des secours publics. Voy. Secours.

Asphyxie des nouveau-nés. Voy. Nouveau-né.

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