Action civile

(Droit). Elle peut être exercée chaque fois qu’un crime, un délit, une contravention a causé un dommage d’un intérêt privé. La partie lésée peut agir alors même que l’auteur du fait n’a pas été poursuivi pour l’application de la peine ; le même droit appartient à ses héritiers. On ne peut obtenir de dédommagement que quand on l’a demandé ; il ne faudrait pas s’attendre à voir les juges saisis de la poursuite du délit en accorder d’office ; ils n’en ont pas le droit. On peut agir, soit contre l’auteur du dommage, soit contre les personnes qui répondent de lui, mais, dans ce dernier cas, les personnes responsables n’ayant commis aucun délit, ne peuvent être actionnées que devant les tribunaux civils ; il en est de même si on réclame contre les héritiers de l’auteur du dommage.

Quand on a été lésé par un délit, on a le choix de demander la réparation soit devant les tribunaux criminels où le prévenu est poursuivi, soit devant les tribunaux civils. Si l’on a préféré la voie civile, et qu’il y ait, en même temps, poursuite criminelle de la part du ministère public, l’action civile est suspendue jusqu’à ce qu’il ait été définitivement prononcé sur le délit.

Quand on demande des dommages-intérêts au même tribunal qui doit prononcer sur la peine, et qu’il s’agit d’un délit correctionnel ou d’une contravention de police, on peut citer le prévenu directement en requérant l’adjonction du ministère public pour l’application de la peine ; ou bien on peut se porter partie civile sur la poursuite dirigée par le ministère public (Voy. Partie civile). Si l’on a préféré d’agir par la voie civile, on cite l’auteur du dommage devant le juge de paix ou le tribunal de première instance, selon l’importance de l’indemnité qu’on réclame, et on suit la forme ordinaire des assignations.

L’action civile s’éteint si celui qui l’avait intentée se désiste : cette renonciation est soumise à certaines conditions de la part de la partie civile, tandis qu’on peut l’exercer quand et comme on veut devant les tribunaux civils. La prescription éteint l’action civile comme l’action publique.

Action judiciaire

C’est le droit de réclamer en justice ce qui nous est dû et le moyen d’exercer ce droit. L’Action personnelle, c.-à-d. dirigée contre la personne de l’actionné ou de ses représentants, doit être portée devant le juge du domicile ou de la résidence du défendeur. L’Action réelle, c.-à-d. portant sur une chose dont on revendique la possession quel qu’en soit le possesseur actuel, doit être portée devant le juge du lieu où est situé l’objet en litige. L’Action mixte, c.-à-d. dirigée à la fois contre la personne et contre la chose, se porte indifféremment devant le juge du domicile du défendeur ou celui de la situation des biens.

Le C. Nap. (art. 526, 529) considère les actions judiciaires comme une véritable propriété immobilière ou mobilière, suivant le cas : elles peuvent se transmettre d’après les règles ordinaires.

Actions possessoires

Elles sont exercées par ceux qui sont troublés dans la possession d’un immeuble ou d’un droit immobilier, et par ceux qui ont été dépossédés et qui demandent à être rétablis dans leur possession. La complainte, la dénonciation de nouvel œuvre, la réintégrande, sont des actions possessoires. Voy. ces mots.

Celui qui demande à être maintenu ou à rentrer en possession ne s’appuie que sur des faits de possession et non sur des titres de propriété. Les faits de possession ne peuvent pas être invoqués pour des objets non susceptibles d’être possédés ni prescrits par des particuliers, tels que routes, rues, places publiques, chemins, églises ou autres édifices consacrés à un usage public, tant qu’ils conservent leur destination d’intérêt général ; mais on peut agir pour se faire maintenir ou rétablir en possession de fonds de terre ou bâtiments appartenant à des communes, à des établissements publics, à l’État, s’ils ne sont pas employés directement au service du public. On peut réclamer la possession, non seulement d’un immeuble corporel, mais d’un droit immobilier, comme l’usufruit d’un immeuble, une servitude susceptible de prescription, etc., et même d’un meuble devenu immeuble par destination, par exemple une ruche à miel ; des murs, haies, fossés, arbres et autres objets servant de limite ou de clôture ; des eaux non navigables ni flottables, des eaux sans cours, comme celles des puits, fontaines, mares, citernes, etc., des chemins d’exploitation, de desserte et autres chemins privés ; d’un droit de passage, sans payement, sur un pont ou un bac ; du droit d’exiger telles réparations à des maisons, moulins ou usines, etc.

Celui qui, troublé dans sa possession, demande à y être maintenu, doit avoir en sa faveur une possession de la même nature et remplissant les mêmes conditions, sauf la durée, que celle qui sert de base à la prescription. Il faut qu’elle soit non interrompue par un tiers et continue, c.-à-d. existant par elle-même et sans avoir besoin du fait actuel de l’homme ; de là il suit qu’elle ne pourrait être invoquée pour le maintien d’une servitude discontinue, comme celles de passage, de pacage, de prise d’eau, à moins que celui qui veut conserver la faculté de se servir d’un tel droit ne produise un titre, lequel prouverait qu’il s’agit d’un vrai droit et non d’une simple tolérance. On peut se faire maintenir dans la possession d’une servitude même discontinue, et sans produire de titre, quand elle dérive de la loi, ou de la situation des lieux ; ainsi, l’action possessoire pourrait être exercée par le propriétaire d’un fonds supérieur pour obtenir la suppression de travaux, par lesquels le propriétaire inférieur empêcherait l’écoulement des eaux pluviales ; il en serait de même pour la possession d’un passage légal nécessaire à l’exploitation d’un fonds enclavé. La possession, pour donner le droit d’intenter l’action possessoire, doit être publique et non clandestine, comme celle qui résulterait d’une usurpation de terre commise graduellement en labourant ; non équivoque, c.-à-d. qu’il faut posséder pour soi-même et non pour autrui, à titre de possession légale et non de simple tolérance, ni d’une manière précaire.

Pour pouvoir exercer une action possessoire, il faut être, par soi ou par les siens, depuis une année au moins, en possession du bien ou du droit dans la jouissance duquel on a été troublé. On peut joindre à la durée de sa possession celle de la possession de celui à qui l’on a succédé, pourvu que celle-ci ait toutes les qualités requises.

Celui qui réunit les conditions de la possession légale doit exercer son action dans l’année du trouble ; s’il s’agissait de réclamations pour des faits remontant plus haut, par exemple d’une demande d’élagage d’arbres étendant leurs branches depuis plusieurs années sur le fonds d’un voisin, ce ne serait plus une action possessoire. Le délai d’un an court contre toutes personnes, contre les absents, les femmes mariées, les mineurs, les interdits. La prescription qui résulterait de l’expiration de l’année peut être interrompue comme la prescription ordinaire.

Tout individu qui a la possession civile et annale d’un immeuble ou droit réel peut agir pour faire cesser le trouble apporté à sa possession. Ainsi, ce droit appartient au propriétaire, à l’usufruitier, à l’emphytéote mais non au fermier, si le propriétaire n’intervient pas, au propriétaire par indivis, au possesseur d’une servitude, à l’héritier apparent, au séquestre, aux habitants d’une commune troublés dans leur jouissance personnelle des biens communaux, etc. Le mari, quand il n’y a pas séparation de biens, peut exercer seul les actions possessoires de sa femme ; il en est de même du tuteur pour celles de son pupille, du maire pour celles de la commune, du préfet pour celles du département ou de l’État, des administrateurs en général. Il faut une autorisation du conseil de préfecture pour que l’action possessoire puisse être intentée par ou contre les trésoriers ou receveurs des hospices, les trésoriers des fabriques, les curés pour les biens de leur cure, les évêques pour la mense épiscopale.

L’action possessoire doit être dirigée contre l’auteur du trouble ; celui-ci, s’il n’a travaillé que par l’ordre et dans l’intérêt d’un tiers, n’en doit pas moins être condamné à remettre les choses dans leur ancien état, à moins qu’il n’ait appelé ce tiers en garantie. Cela s’appliquerait à un fermier auteur personnel du trouble : il ne peut demander sa mise hors de cause ; mais si le propriétaire n’y a pas été appelé, il a le droit de se pourvoir par tierce opposition contre le jugement. Lorsqu’on demande non pas à être maintenu dans sa possession, mais à y être réintégré après en avoir été dépouillé, on peut agir isolément ou solidairement contre le détenteur actuel, contre ceux qui ont commis la violence ou voie de fait, et contre ceux qui l’ont approuvée ou commandée.

Les actions possessoires doivent être portées devant le juge de paix de la situation de l’objet litigieux. Celui qui forme la demande doit prouver sa possession, ce qu’il peut faire par écrits et par témoins, et son adversaire, s’il prétend que c’est à lui que la possession appartient, en doit fournir la preuve de la même manière. Lorsque la partie actionnée comme ayant causé un trouble à la possession, nie le trouble, c’est au demandeur à le prouver ; si les preuves qu’il fournit ne sont pas suffisantes, le juge de paix peut ordonner une enquête, laquelle ne peut jamais porter sur le fond du droit, mais seulement sur les faits de possession allégués et déniés. Si aucune des parties ne justifie de sa possession, le juge de paix est obligé de renvoyer le défendeur, en laissant les choses dans le statu quo ; si le demandeur n’établit pas sa possession, et que le défendeur justifie d’une possession annale et régulière, le magistrat adjuge la possession à ce dernier ; si le demandeur fait sa preuve, il doit être maintenu en jouissance, et le défendeur condamné, s’il y a lieu, à rétablir les choses dans leur état primitif, dans un certain délai : le demandeur troublé peut, de plus, obtenir des dommages-intérêts pour le préjudice qu’il a souffert, et, en tous cas, il a droit à la restitution des fruits indûment perçus.

On ne peut soumettre en même temps aux tribunaux la question de possession de certains immeubles ou droits, et la réclamation de propriété de ces mêmes objets. En conséquence, si on a commencé par réclamer la propriété, on ne peut plus agir pour se faire maintenir ou rétablir en possession ; en procédant ainsi, on est censé avoir reconnu la possession de son adversaire. Celui qui est actionné comme ayant commis un trouble à la possession ne peut agir pour se faire reconnaître comme propriétaire qu’après que l’instance sur la possession aura été terminée ; et s’il a succombé, il ne peut se pourvoir sur la question de propriété qu’après avoir pleinement satisfait aux condamnations prononcées contre lui, sauf à lui, si la partie qui a obtenu ces condamnations tardait à en faire fixer le montant, de faire fixer par le tribunal qui devra statuer sur la propriété un délai après lequel l’action sera reçue (C. de proc civ., art. 3 et 23-27).

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